Ce texte d’opinion a été publié en anglais dans le Toronto Star le 1er aout, 2022.
Tabatha Bull, présidente et chef de la direction du Conseil canadien pour le commerce autochtone
L’enseignement des Sept Générations nous apprend que nous devons tenir compte des répercussions de nos paroles, de notre travail et de nos gestes sur notre septième génération. Ce sont les arrière-arrière-petits-enfants de nos arrière-petits-enfants.
C’est une approche puissante.
Investir dans l’éducation autochtone aura sans aucun doute des retombées bénéfiques sur les prochaines générations. Les jeunes Autochtones, qui constituent le groupe démographique dont la croissance est la plus rapide au Canada, contribuent de manière significative non seulement à l’essor de leurs communautés, mais aussi à celui de notre pays.
Nous pouvons donner notre appui aux jeunes Autochtones en les aidant – et en les encourageant – à acquérir des expériences internationales de travail et d’études.
Les études à l’étranger enseignent la résolution de problèmes, la communication, la sensibilité culturelle, les langues, l’adaptabilité et le travail d’équipe, des compétences que les étudiants ramènent dans leurs classes et leurs communautés. Les étudiants qui font des séjours d’études ou de travail à l’étranger gagnent aussi généralement plus dans leur carrière et réussissent mieux dans l’économie mondiale que ceux qui n’en font pas.
C’est également bon pour la prospérité du Canada.
Bon nombre des priorités auxquelles les entreprises canadiennes sont confrontées ont une portée mondiale : lutte contre les changements climatiques, préparation à la prochaine pandémie, intensification et diversification de nos relations commerciales.
Les entreprises canadiennes ont tout à gagner à embaucher des personnes capables d’établir des relations solides et de confiance avec des gens d’ailleurs. Les séjours à l’étranger connectent les étudiants à des réseaux internationaux offrant de nombreuses possibilités, ce qui renforce les liens du Canada avec les pays de destination et contribue directement à nos objectifs commerciaux.
En outre, les Autochtones créent neuf fois plus d’entreprises que les non-Autochtones et sont deux fois plus susceptibles d’exporter ou de chercher à exporter des biens ou des services.
Il est tout à fait logique que le Canada aide son groupe démographique à la croissance la plus rapide à se doter de compétences internationales.
Je peux moi-même attester des avantages d’une expérience internationale. En 12e année, en tant que participante au programme des Échanges de jeunes du club Rotary, j’ai fréquenté une école secondaire à Turku, en Finlande, et vécu dans trois familles différentes.
Ce fut une incroyable expérience d’apprentissage et de croissance. Vivre à l’étranger à 17 ans, complètement immergée dans une autre culture et un autre mode de vie, m’a appris la persévérance et l’ouverture à de nouvelles possibilités.
Le fait de nouer des amitiés au-delà des différences culturelles, impliquant parfois de grandes barrières linguistiques, a beaucoup contribué à façonner la personne que je suis devenue.
Je me sens incroyablement chanceuse d’avoir voyagé, en particulier pendant mes années d’études. Je sais combien mes parents ont sacrifié pour que j’aie cette possibilité. Bien d’autres d’étudiants n’ont pas cette chance.
Avant la pandémie de COVID-19, à peine 11 % des étudiants canadiens de premier cycle et 3 % des étudiants de niveau collégial avaient participé à une expérience internationale au cours de leurs études. Ces pourcentages sont beaucoup plus faibles chez les étudiants autochtones.
Conscient du besoin, le gouvernement fédéral a lancé le programme Expérience compétences mondiales (ECM) en 2021. Ayant pour objectif d’aider les étudiants à acquérir des compétences internationales, ce programme est le fruit d’un investissement de 95 M$ dans l’avenir du Canada.
Je suis particulièrement ravie que le programme vise à garantir l’accès à tous les étudiants canadiens de niveau postsecondaire. La moitié du financement est ainsi destinée aux étudiants de groupes sous-représentés, soit les étudiants autochtones, handicapés ou issus de milieux défavorisés.
Au Conseil canadien pour le commerce autochtone, nous constatons que les jeunes et les entrepreneurs autochtones se heurtent à deux obstacles majeurs : l’accès équitable aux programmes et aux réseaux.
Il ne suffit donc pas de donner la possibilité à tous de participer, il faut aussi leur en donner les moyens et supprimer les obstacles à l’accès.
C’est là l’objectif d’ECM.
Non seulement le programme ECM fournit-il un financement supplémentaire aux étudiants de groupes sous-représentés, mais il facilite aussi l’ensemble du processus. Par exemple, de nombreux voyages durent seulement quelques semaines, ce qui est plus pratique pour les étudiants ayant des obligations familiales ou professionnelles. Et certaines expériences sont proposées virtuellement – une conséquence inattendue, mais bienvenue, de la pandémie.
Plusieurs projets menés sous l’égide d’ECM intègrent des approches autochtones et ont tissé des liens avec des communautés autochtones d’autres pays. Dans certains cas, un Aîné autochtone accompagne les étudiants dans leurs déplacements.
Le programme produit déjà des résultats.
Au cours des quelques mois qui ont suivi la reprise sécuritaire des voyages internationaux, plus de 1000 étudiants canadiens des niveaux collégial et universitaire se sont lancés dans des expériences internationales qui ont changé leur vie et stimulé leur carrière grâce au programme ECM. De ce nombre, près d’un sur cinq s’est identifié comme Autochtone.
Et ce n’est que le début. D’ici 2025, plus de 16 000 étudiants canadiens de niveau postsecondaire tireront profit du programme ECM. Les compétences, l’empathie et la compréhension culturelle qu’ils acquerront et les réseaux qu’ils se bâtiront nous seront profitables à tous.
Nous avons beaucoup de travail à faire si nous souhaitons laisser un monde meilleur à nos sept prochaines générations, et nous devons le faire ensemble.
Ce programme est un pas dans la bonne direction.