Cette lettre ouverte a été publiée dans le journal The Hill Times du 20 juin 2016
par Paul Davidson
Durant la plus longue journée de l’année, le soleil brillera pendant plus de 15 heures sur Ottawa, alors qu’à Inuvik, terre du soleil de minuit, il n’y aura pas de ténèbres. Pour les collectivités autochtones, le solstice d’été est un jour de célébration, une occasion de se rappeler le lien qui nous unit à la Terre et la munificence de l’été. Le 21 juin, qui est la Journée nationale des Autochtones, ne manquons pas de songer aussi à la clarté qu’apportera la réconciliation.
À la publication du rapport préliminaire de la Commission de vérité et réconciliation (CVR) il y a un an, le juge Murray Sinclair a clairement souligné le rôle de l’enseignement dans la réconciliation. « L’éducation est à la source du problème, a-t-il déclaré à la CBC. Mais elle est également essentielle à la réconciliation… »
Les universités du Canada acceptent de relever le défi et continuent de multiplier les efforts pour concrétiser la réconciliation grâce à l’éducation. Pour façonner un avenir inclusif, novateur et prospère, il faut favoriser l’accès et la réussite des étudiants autochtones qui aspirent à des études postsecondaires.
On pourra y parvenir grâce au dialogue et à l’action.
Des discussions constructives ont été entamées. Par exemple, la University of Manitoba et la University of Winnipeg ont tenu la semaine dernière une conférence intitulée « Les voies de la réconciliation ». Celle-ci intégrait un exposé de Frank Iacobucci, ancien juge à la Cour suprême et négociateur de la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, dans le cadre d’une séance organisée par Universités Canada. Des personnes de partout au Canada se sont réunies à l’occasion de cette conférence, qui se déroulait à guichets fermés, afin de réfléchir et de discuter, et de trouver une façon d’avancer.
Une meilleure compréhension de la situation empêchera le passé de sombrer dans l’oubli. Elle permettra aussi à l’histoire et à la culture autochtones d’être intégrées à tous les niveaux du système d’éducation et d’être prises en compte dans tous les milieux de travail.
Aspirer à des études supérieures est un objectif raisonnable pour tout Canadien. En fait, 26 pour cent des Canadiens non autochtones (âgés de 25 à 64 ans) sont titulaires d’un diplôme universitaire. Cependant, ce pourcentage est inférieur à 10 pour cent chez les Autochtones; une situation inacceptable. Il est impératif de la corriger, pour des raisons morales et économiques, et de le faire rapidement.
Tout le monde sait que des défis particuliers se posent, qui exigent des solutions particulières.
Les universités canadiennes investissent dans les connaissances et les compétences des jeunes Autochtones pour former la prochaine génération d’innovateurs et de leaders. Selon un sondage mené récemment par Universités Canada, la majorité des universités canadiennes offrent des programmes qui facilitent la transition des étudiants autochtones vers des programmes d’études supérieures. Il s’agit entre autres de programmes de sensibilisation dans les collectivités, de soutien pédagogique, d’aînés en résidence et de mentorat dès l’école primaire.
Dans l’ensemble des campus canadiens, 233 programmes d’études au premier cycle et 62 programmes d’études aux cycles supérieurs portent sur des questions autochtones ou sont spécialement conçus pour les étudiants autochtones. Leur nombre a augmenté de 33 pour cent en seulement deux ans. Plus de 30 langues autochtones sont également enseignées dans nos universités.
Il y a un an, les universités canadiennes ont adopté un ensemble de principes visant à favoriser l’accès et la réussite des étudiants autochtones et à accroître le leadership autochtone dans le milieu universitaire.
Beaucoup de choses positives se passent, mais il reste encore beaucoup à faire. Comme il a été clairement souligné la semaine dernière dans le cadre de la conférence « Les voies de la réconciliation », il faut réunir de nombreux partenaires pour générer de véritables changements.
Le gouvernement fédéral s’est engagé à investir dans l’éducation primaire et secondaire. Il s’agit d’un premier pas dans la bonne direction pour combler le fossé qui sépare les enfants des Premières Nations de ceux du reste du pays en matière d’éducation. La prochaine étape consistera à consacrer des efforts pour répondre aux aspirations de poursuivre des études postsecondaires afin de préparer les étudiants pour l’avenir.
Les besoins sont réels. Ils demeurent largement supérieurs aux fonds mis à la disposition des étudiants autochtones qui veulent entreprendre des études supérieures.
Ry Moran, directeur du Centre national pour la vérité et réconciliation de la University of Manitoba, expliquait la semaine dernière que nous étions prêts à découvrir ce qui fait de nous des Canadiens. « Notre capacité à concrétiser les profonds changements demandés par la CVR sera façonnée par la façon dont les Canadiens perçoivent et comprennent les Autochtones. La voie d’une meilleure compréhension collective de l’histoire, des cultures et des droits autochtones est celle que nous devons poursuivre… », a-t-il également précisé dans une chronique.
Le gouvernement doit cheminer avec nous sur cette voie en fournissant une aide financière directe aux étudiants et en faisant des investissements pour améliorer les programmes existants destinés aux étudiants et aux collectivités autochtones, que ce soit sur les campus ou ailleurs. Il doit aussi investir dans des bourses d’études supérieures qui appuient la formation de leaders et d’universitaires autochtones.
Une formation universitaire est source de transformation pour les individus, pour les collectivités et pour le Canada. Cette possibilité doit être offerte à tous.
Paul Davidson est le président-directeur général d’Universités Canada.
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