Reconnaissance internationale de l’excellence canadienne – 2020
Lauréats canadiens de 2020 de prestigieux prix internationaux en recherche
Les 23 chercheurs illustrés ci-dessous ont procuré au monde des résultats de recherche qui non seulement font progresser la science de manière générale, mais qui améliorent aussi notre qualité de vie et contribuent à stimuler la croissance économique au Canada. Grâce aux découvertes qu’ils font, aux équipes qu’ils forment et aux retombées qu’ils génèrent, nos meilleurs chercheurs aideront le Canada à sortir encore plus fort de la crise de COVID-19.
En apprendre plus sur les gagnants
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Gilles Brassard
Prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA
Cryptographie quantiqueGilles Brassard
Protéger les communications en ligne grâce à la cryptographie quantique
Prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA
Cryptographie quantiqueGilles Brassard, professeur et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en informatique quantique à l’Université de Montréal, a remporté le prix « Aux confins
du savoir » de la Fondation BBVA dans la catégorie Sciences fondamentales, aux côtés de ses collègues Charles Bennett et Peter Shor, pour sa contribution exceptionnelle
dans les domaines de l’informatique quantique et de la communication.M. Brassard, informaticien, et M. Bennet, physico-chimiste, ont inventé la cryptographie quantique dans les années 1980 pour sécuriser la communication de données.
« Nous avons découvert comment utiliser la physique quantique pour créer un schéma de cryptage inviolable, ce que nous appelons la “cryptographie quantique”, explique
M. Brassard. Celle-ci est en principe inviolable, dans la mesure où la théorie quantique demeure vraie ».L’importance de leurs travaux n’est devenue apparente qu’une décennie plus tard, lorsque le mathématicien Peter Shor a découvert qu’un hypothétique ordinateur
quantique pourrait pénétrer les systèmes cryptographiques aujourd’hui utilisés pour protéger les communications sur Internet. Autrement dit, lorsque l’ordinateur quantique
deviendra réalité, la cryptographie quantique sera le seul moyen absolument sûr de préserver la confidentialité des communications en ligne.« Si la société ne s’est pas effondrée à l’époque [de la découverte de M. Shor], c’est parce que les ordinateurs quantiques n’existaient pas », affirme M. Brassard. « Nous ne savions pas comment les fabriquer. Ça nous apparaissait comme de la science-fiction, alors personne ne s’en est inquiété ».
La technologie a toutefois rapidement évolué. « Aujourd’hui, nous savons que ce n’est qu’une question de temps. Des efforts internationaux considérables sont consacrés à la
création d’ordinateurs quantiques. Nous savons tous que cela va finir par arriver ».Quand ils ont inventé la cryptographie quantique il y a 35 ans, MM. Brassard et Bennet considéraient la chose comme « une curiosité ». Cela a changé lorsque M. Shor leur
a montré la vulnérabilité des systèmes actuels de protection des données. « Nous avons découvert le remède avant d’apprendre l’existence de la maladie », illustre M. Brassard.Le prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA figure parmi les prix scientifiques les plus prestigieux au monde, et nombre de ses lauréats ont plus tard remporté le prix Nobel.
En 2018, Gilles Brassard a été le premier Canadien à recevoir le prix Wolf de physique, considéré comme le plus grand honneur en physique après le prix Nobel, « pour avoir fondé et développé les domaines de la cryptographie quantique et de la téléportation quantique ».
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Taylor Brook
Bourse de recherche Guggenheim
MusiqueTaylor Brook
Un compositeur élargit son auditoire grâce à sa musique « captivante »
Bourse de recherche Guggenheim
Musique« Fascinantes » et « captivantes ». C’est ainsi que le New York Times a décrit les compositions de Taylor Brook qui rythment concerts, films, pièces de théâtre et spectacles de danse. Lauréat 2020 de la bourse de recherche Guggenheim en composition musicale, M. Brook espère bientôt faire connaître son travail à un auditoire plus large.
La bourse Guggenheim permettra à M. Brook de financer, entre autres, ses travaux actuels avec l’ensemble TAK de New York, pour qui il compose un morceau retraçant le contexte de la nouvelle de 1908 de E.M. Forster, La machine s’arrête.
L’auteur y dépeint un monde où les ressources ont été épuisées, et où les gens vivent sous terre et communiquent grâce à une sorte de messagerie instantanée. « On peut dire que c’est une œuvre prémonitoire à bien des égards, déclare M. Brook. Pour l’accompagner, j’écris un long morceau de musique d’une quarantaine de minutes. »
- Brook explique que ses travaux « portent souvent sur des sonorités microtonales accordées avec précision, où transparaissent [son] goût pour l’exploration des qualités perceptives du son et un sens formel et esthétique singulier. »
À mesure que son travail évolue, M. Brook dit s’intéresser aux « nouveaux modes d’expression dans la composition musicale et la musique savante en général. » Il espère également pouvoir toucher une « plus large part de la population » grâce à ses compositions. « Je veux que mes créations puissent aussi séduire des non-initiés à la musique savante, » indique-t-il.
Mais son vœu a, semble-t-il, déjà été exaucé.
« J’ai été heureux de constater qu’une de mes compositions avait été écoutée plus de 100 000 fois sur YouTube, se réjouit-il. Comparativement à ces dernières années, c’est le jour et la nuit. »
Le compositeur canadien est actuellement chargé de cours à l’Université Columbia. En mars 2020, il a quitté New York pour la Colombie-Britannique en raison de la pandémie.
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Simon Caron-Huot
Bourse de recherche Sloan
PhysiqueSimon Caron-Huot
À la recherche des lois au croisement de la physique et des mathématiques
Bourse de recherche Sloan
PhysiqueSimon Caron-Huot, physicien à l’Université McGill, décrit ses travaux de recherche comme « une tentative de faire des calculs très précis sans connaître les règles du jeu. » Lauréat 2020 d’une bourse de recherche Sloan, il étudie les interactions entre les particules élémentaires.
« Dans la physique de tous les jours, on peut prédire la façon dont les objets se déplacent en déterminant la nature des forces qui agissent sur eux. Or, les particules élémentaires ne se déplacent pas grâce à des forces, mais en échangeant d’autres particules, explique le scientifique. Les lois qui s’appliquent sont donc tout à fait différentes. »
Il ajoute : « Ce qui est intéressant, c’est que ces lois sont très strictes… Elles émanent des principes de la relativité et de la mécanique quantique. »
Comme toujours en recherche fondamentale, il est impossible pour l’heure de déterminer clairement les éventuels débouchés de ces travaux.
« Il faut adopter une vision à long terme, » précise M. Caron-Huot. « Il y a 200 ans, les gens étudiaient l’électricité alors qu’il n’existait encore aucune application concrète. »
À plus court terme, le chercheur espère que ses travaux permettront de simplifier certains calculs de physique.
Il indique : « Ce qui me fascine, c’est la force forte. Elle permet de maintenir les quarks entre eux pour former des protons et des noyaux, mais on ne comprend pas comment elle fonctionne. À l’heure actuelle, il est très difficile de prédire les propriétés des noyaux à partir de leurs constituants. J’aimerais que ça devienne beaucoup plus simple. Grâce à des calculs complexes, on peut déjà avoir une idée de ce qui se passe, mais je souhaiterais créer des outils qui permettraient à de plus en plus de gens de le faire. C’est-ce qui conduit à de nouvelles découvertes. »
Il ajoute : « Il nous faut parfois deviner quels sont les différents principes. Mais il y a une certaine beauté dans les formules que l’on obtient. »
Grâce soutien financier de la bourse Sloan, M. Caron-Huot prévoit attirer les meilleurs postdoctorants afin de faire encore progresser ses travaux de recherche.
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John Cherry
Prix de l’eau de Stockholm
EauJohn Cherry
Un pionnier de la recherche sur les eaux souterraines poursuit ses efforts de sensibilisation
Prix de l’eau de Stockholm
EauJohn Cherry est le premier chercheur à étudier les eaux souterraines et le deuxième Canadien à remporter le prix le plus prestigieux au monde dans le domaine de la recherche hydrique. Assorti d’une bourse de 150 000 $, le Prix de l’eau de Stockholm honore des chercheurs et des organismes pour leurs réalisations exceptionnelles dans le domaine de l’eau. Lors de l’annonce du lauréat de 2020, l’Institut international de l’eau de Stockholm a déclaré que M. Cherry avait « révolutionné notre compréhension de la vulnérabilité des eaux souterraines », ajoutant que « ses travaux de recherche ont attiré l’attention sur la contamination grandissante des eaux souterraines partout dans le monde, et ont permis la mise au point de méthodes plus efficaces pour lutter contre ce problème. »
En 2016, M. Cherry a en outre remporté à Singapour le Lee Kuan Yew Water Prize, d’une valeur de 300 000 $. Aucun Canadien avant lui n’avait reçu les deux prix les plus prestigieux du monde dans le domaine de l’eau.
La vulnérabilité des eaux souterraines était mal connue à l’époque où M. Cherry, aujourd’hui professeur émérite à la University of Waterloo, a entrepris ses travaux de recherche sur la contamination des nappes souterraines, dans les années 1960. En 1979, il cosignait Groundwater, un ouvrage de référence reconnu par les scientifiques du monde entier, et il est aujourd’hui l’un des trois chercheurs les plus cités du monde dans son domaine. Depuis des décennies, ses travaux mettent en lumière les dangers de la surexploitation et de la contamination des eaux souterraines.
« Ces deux problèmes sont en grande partie responsables de la crise actuelle de l’eau à l’échelle planétaire, » affirme-t-il. Et le monde en est de plus en plus conscient, la diminution des nappes souterraines étant désormais considérée comme une crise par les Nations Unies. ONU-Eau a même choisi « Les eaux souterraines : rendre l’invisible visible » comme thème de la Journée mondiale de l’eau en 2022.
Aujourd’hui, M. Cherry dirige le Groundwater Project, une initiative visant à publier des centaines de livres électroniques dans plusieurs langues et d’autres ressources éducatives sur les eaux souterraines, et à les offrir gratuitement en téléchargement. Cette initiative (gw-project.org) est située à la University of Guelph, où M. Cherry est chercheur principal au G360 Institute for Groundwater Research, un carrefour de collaborations en matière de recherche entre le milieu universitaire, les gouvernements et les industries du monde entier.
- Cherry compte utiliser la bourse du Prix de l’eau de Stockholm pour continuer à sensibiliser le monde à la crise planétaire des eaux souterraines.
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Ruobing Dong
Bourse de recherche Sloan
PhysiqueRuobing Dong
Déceler, à travers des nuages de poussière et de gaz, d’autres planètes capables d’accueillir la vie
Bourse de recherche Sloan
PhysiquePour rechercher la vie ailleurs que sur Terre, il faut déjà savoir quels types d’exoplanètes – ces corps célestes qui gravitent autour d’une autre étoile que le Soleil – sont susceptibles de l’abriter. Cette problématique intéresse Ruobing Dong, qui tente plus précisément de déterminer comment de telles planètes peuvent se former dans leur berceau autour d’étoiles jeunes.
« C’est une grande question : comment les planètes se forment-elles?, » s’interroge cet astrophysicien de la University of Victoria. « Tout l’enjeu de mon travail est justement d’apporter de nouveaux éléments de réponse. »
Les travaux de recherche de M. Dong, qui portent plus particulièrement sur les traces déposées lors de la formation des planètes, pourraient aussi permettre de lever le voile sur l’histoire de la naissance de la Terre. Pour expliquer le concept, il utilise l’analogie avec la trainée que laisse un avion lorsqu’il passe dans le ciel – une sorte de signature. Sauf que pour les exoplanètes, son équipe examine le disque protoplanétaire, composé de poussière et de gaz, qui entoure toute étoile naissante. À l’aide des télescopes les plus puissants au monde, tels qu’ALMA, GEMINI et HUBBLE, les scientifiques recherchent les signatures au sein de ces disques.
« Mon travail consiste à examiner les disques et à y trouver les traces qui y ont été déposées, » explique-t-il – ces fameuses signatures qui pourraient révéler la formation de planètes, dont certaines possèdent les caractéristiques nécessaires pour accueillir la vie.
Lauréat 2020 d’une bourse de recherche Sloan en physique, M. Dong est ravi de pouvoir élargir son équipe et de faire progresser ses travaux.
Il explique au sujet de cette récompense : « Je me sens extrêmement chanceux. Je garde aussi la tête sur les épaules, car je sais que de nombreux scientifiques font un travail exceptionnel, mais la chance m’a souri, et c’est moi qui ai eu le privilège d’obtenir cette bourse. »
Comme chercheur en début de carrière, M. Dong estime qu’une distinction comme la bourse Sloan permet aussi de gagner en confiance. Il précise : « C’est le signe que vous n’êtes pas seul à juger faire du bon travail. Vos collègues le pensent aussi. »
Dong espère que cette bourse viendra confirmer à ses parents qu’il a un véritable emploi, chose qui, selon lui, ne leur paraît pas toujours claire.
Il raconte : « J’ai maintenant quelque chose à faire valoir auprès de mes parents. Je peux leur dire : ‘‘Regardez, il y a des gens qui me donnent 75 000 $ pour soutenir ma recherche.” Tout à coup, c’est du concret. Ça ressemble bien à un véritable emploi pour étudier des trucs très très loin de la Terre. »
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Daniel Drucker
Prix de la Fondation Warren Alpert
MédecineDaniel Drucker
Au bon endroit, au bon moment : quand une heureuse coïncidence permet de découvrir, 35 ans plus tard, des traitements qui sauvent des vies
Prix de la Fondation Warren Alpert
MédecineEn 1984, alors stagiaire en endocrinologie à la University of Toronto, le Dr Daniel Drucker a été envoyé à Boston pour faire de la recherche sur la thyroïde à l’Hôpital général du Massachusetts.
« Mais quand je suis arrivé, il n’y avait pas vraiment de place pour moi sur ce projet, » se souvient-il. « On m’a alors fait faire de la recherche sur le gène du glucagon. Je me suis dit que mon équipe à Toronto n’allait pas être très contente. »
Il poursuit : « En plus, je ne savais pas grand-chose sur ce projet. Mais j’étais très jeune et j’ai fait ce qu’on m’a dit. »
Cette mission imprévue a finalement été le point de départ de travaux de recherche qui ont non seulement mené à des traitements contre l’obésité et l’insuffisance intestinale, mais aussi à des médicaments pour réduire les taux de mortalité cardiovasculaire. Et, grâce à cet heureux hasard, le Dr Drucker, aujourd’hui professeur de médecine à la University of Toronto, et deux de ses collègues, le Dr Joel Habener de la Faculté de médecine de l’Université Harvard et le Dr Jens Juul Holst de l’Université de Copenhague, se partagent le prix 2020 de la Fondation Warren Alpert, d’un montant de 500 000 $.
Les trois scientifiques sont parvenus à cerner une famille de peptides ressemblant au glucagon et à se hisser en tête de la course dans ce domaine de recherche axé sur le métabolisme. Leurs travaux ont permis de percer les mystères des voies de signalisation hormonales dans l’intestin, qui régulent le flux de sucre dans le sang et interagissent sur le fonctionnement de tous les organes.
« C’était une heureuse coïncidence. Je me suis trouvé au bon endroit au bon moment, puis j’ai persévéré pendant 30 ans, » résume le Dr Drucker.
Les découvertes qu’il a effectuées avec ses collègues sont également porteuses d’espoir dans le traitement des maladies du foie, de Parkinson et d’Alzheimer.
« Il y a une chance sur 10 000 de réussir à transformer une découverte de science fondamentale en avancée médicale. Alors pour être franc, on se disait que ces hormones étaient vraiment chouettes et qu’on y arriverait peut-être un jour. Mais ce n’est qu’il y a 15 ou 20 ans que nous avons eu l’idée d’utiliser ces substances comme médicaments pour traiter des maladies humaines, » raconte le Dr Drucker.
Bien que l’obtention d’un prix aussi prestigieux soit « toujours la cerise sur le gâteau, » le scientifique estime qu’il est encore bien plus gratifiant de rencontrer une personne qui bénéficie de ces nouveaux traitements.
« C’est la plus belle des consécrations, » conclut-il.
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David Dyzenhaus
Bourse de recherche Guggenheim
DroitDavid Dyzenhaus
Examiner la loi utilisée comme moyen d’oppression et d’émancipation
Bourse de recherche Guggenheim
DroitSi vous interrogez David Dyzenhaus sur l’objet de ses travaux de recherche actuels, ce professeur de droit et de philosophie à la University of Toronto vous répondra qu’il essaie de donner du sens à ce qu’il fait depuis 1984. En fait, il se consacre à certaines grandes problématiques, telles que les conséquences d’un recours à la loi comme instrument d’oppression ou l’utilisation de la loi contre la loi.
Lauréat de la bourse de recherche Guggenheim 2020 en sciences sociales – droit, M. Dyzenhaus prévoit d’accorder plus de temps à ses travaux de recherche au cours de l’année à venir.
Le juriste a grandi en Afrique du Sud et a étudié le droit et la théorie politique au plus fort de l’apartheid. Tout au long de ses études et de sa carrière de chercheur, il a voulu montrer comment les questions fondamentales de la philosophie politique et juridique s’invitaient dans la pratique courante.
« Même si je faisais partie d’un groupe privilégié, j’ai grandi dans une société extrêmement autoritaire et opprimée, » déclare M. Dyzenhaus. « Le gouvernement utilisait la loi pour servir ses propres intérêts, mais les citoyens y avaient aussi recours pour agir contre le régime. »
Son projet de recherche actuel examine comment les ordres juridiques entrent parfois en conflit les uns avec les autres, en s’appuyant sur les exemples de la Chine, d’Israël et des Territoires occupés, ou des États-Unis avant la guerre de Sécession – comme en témoigne la « fuite des esclaves noirs. » Dans tous ces cas, les grandes questions morales et éthiques sont devenues des problèmes juridiques pratiques.
« Si l’on regarde la situation aux États-Unis avant la guerre de Sécession et si l’on divise le pays entre Nord et Sud, on s’aperçoit que la constitution posait un énorme problème. En effet, au Sud, elle instituait l’esclavage et exigeait l’extradition vers son territoire de tout esclave évadé […] Mais étaient-ce les règles de propriété du Sud – qui faisaient de cette personne un bien – qui devaient s’appliquer ou celles du Nord? Les juges du Nord ont dû tenter de résoudre la situation. »
« Mais ce problème juridique est devenu extrêmement compliqué et ses conséquences ont en partie contribué à mettre le feu aux poudres et à déclencher les hostilités, » explique M. Dyzenhaus.
Le chercheur espère que ses prochains travaux, en plus d’aborder des questions universitaires depuis longtemps sur la table, permettront d’éclairer des experts en droits de la personne du monde entier.
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James Grier
Bourse de recherche Guggenheim
MusiqueJames Grier
Quand les manuscrits rencontrent la musique : étudier les origines de l’alphabétisation musicale
Bourse de recherche Guggenheim
MusiqueLes derniers travaux de recherche de James Grier combinent son amour de la musique et des manuscrits. Ce professeur d’histoire de la musique à la Western University étudie en effet les premières musiques écrites, qui remontent aux Xe et XIe siècles. Son objectif est de mieux comprendre les mécanismes de l’alphabétisation musicale – en d’autres termes, à savoir comment les musiciens en arrivent à lire et à jouer la musique.
« En musique, on utilise en fait un système extrêmement avancé de communication symbolique non verbale – des images qui correspondent à des éléments, » indique-t-il. « Mais comment une personne qualifiée parvient-elle à le décrypter? Et comment la plupart des musiciens s’y prennent-ils pour lire la musique? Ce n’est pas si simple. »
Selon lui, les personnes qui lisent à vue illustrent la complexité des mécanismes impliqués. « Les musiciens professionnels consacrent énormément de temps et d’argent à lire plus efficacement la musique, » raconte M. Grier. « Ainsi, sans n’avoir jamais vu auparavant un morceau de musique, ils sont capables de le jouer à vue… Ils le font donc de manière très automatique. »
Grâce au soutien financier de la bourse Guggenheim qu’il a obtenue en 2020 pour ses travaux en musique, M. Grier prévoit se plonger encore davantage dans les mystères de l’alphabétisation musicale.
« Je m’intéresse à la période médiévale et je regarde d’où tout ça peut venir […] Il existe de nombreux liens avec l’Église qui souhaitait avoir la mainmise sur l’utilisation de la musique liturgique. Elle a alors créé la notation musicale afin de pouvoir contrôler la musique et les méthodes associées », explique le chercheur.
Mais de nombreuses questions subsistent.
« Pourquoi a-t-on inventé ces symboles plutôt que d’autres?, » s’interroge-t-il. « Comment un musicien talentueux a-t-il été formé à les déchiffrer dans un monastère? Quels sont les mécanismes qui participent à la traduction de ces symboles? »
Grâce à la bourse de recherche Guggenheim, M. Grier devrait pouvoir, dans les années à venir, proposer des réponses à ces questions.
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Renée Hložek
Bourse de recherche Sloan
CosmologieRenée Hložek
Étudier les confins de l’univers
Bourse de recherche Sloan
Cosmologie« Toutes les questions qui vous gardent éveillés la nuit – sur la naissance de l’univers, sa composition, sa mort –, c’est mon travail d’y répondre. » C’est ainsi que Renée Hložek, cosmologue à la University of Toronto répond lorsqu’on lui demande ce qu’elle fait dans la vie.
« Je pose les questions, ce qui est plaisant, mais j’ai aussi l’occasion d’y répondre de façon quantitative. » Pour trouver ces réponses, la lauréate 2020 de la bourse de recherche Sloan en physique utilise des télescopes d’un peu partout dans le monde.
« Nous recueillons beaucoup de données sur le ciel dans son ensemble; nous créons une carte du ciel dans différentes longueurs d’onde et réalisons des analyses statistiques de l’univers pour savoir de quoi il est composé, comment se forment les étoiles et comment l’univers évoluera. »
Ces travaux consistent principalement à étudier la fin de l’univers.
« Les gens me demandent comment c’est d’étudier la fin de l’univers, et je trouve ça extrêmement libérateur. Même si j’arrive à déterminer exactement ce qu’il se passe dans l’univers, je ne peux absolument rien y changer. Et pour moi, c’est plutôt libérateur. »
Dans les années à venir, Mme Hložek entend se consacrer à quelques questions fondamentales.
« Quelque chose éloigne les composants de l’univers plus rapidement que la gravité ne peut les réunir. C’est ce que nous appelons l’énergie noire. Nous ne savons pas encore ce que c’est; il nous manque toujours des données pour trouver la réponse. »
La chercheuse espère trouver des réponses grâce à une initiative de collaboration internationale dont elle fait partie, l’observatoire Rubin, ainsi qu’à un nouveau grand télescope situé aux États-Unis, qui balaie le ciel tous les deux ou trois jours.
« Nous pourrions passer du stade où nous ne possédons que peu de données sur les étoiles et le ciel, à celui où nous aurions des données sur des millions d’objets […] Nous pourrions en apprendre tellement plus sur les propriétés de l’expansion de l’univers. »
« C’est ce que j’attends depuis toujours. » L’observatoire devrait commencer à générer des données d’ici un an ou deux.
La bourse Sloan permettra à Mme Hložek d’attirer de nouveaux talents au Canada et dans son laboratoire.
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Michael Houghton
Prix Nobel
MédecineMichael Houghton
Le nouveau lauréat canadien du prix Nobel contribue à résoudre des crises sanitaires mondiales
Prix Nobel
MédecineC’est au beau milieu de la nuit le 5 octobre dernier que Michael Houghton, professeur de la University of Alberta, a appris que lui et ses collaborateurs venaient de remporter le prix Nobel de 2020 de médecine ou physiologie. M. Houghton a remporté le Nobel en collaboration avec les scientifiques Harvey Alter et Charlie Rice pour leur contribution significative à la lutte contre l’hépatite à diffusion hématogène, un problème de santé mondial majeur qui provoque la cirrhose et le cancer du foie.
Houghton dit avoir tenté en vain de retourner au lit après l’appel de son collègue à 3 h du matin. « J’y ai finalement renoncé, a-t-il raconté en entrevue avec Adam Smith de la Nobelprize.org. Et puis lorsque j’ai ouvert mes courriels, il y en avait des centaines […] ce qui est très agréable, bien sûr. »
En 1989, les trois chercheurs ont découvert le virus responsable de l’hépatite C, une maladie à l’origine de 400 000 décès chaque année dans le monde.
Leur découverte a permis de protéger les réserves de sang contre la transmission du virus. Les chercheurs ont rapidement mis au point un test sanguin et, en 1992, le virus était pratiquement éliminé des inventaires de sang dans le monde développé.
Leur attention s’est ensuite tournée vers les traitements. « Il a fallu à l’ensemble du milieu et à l’industrie pharmaceutique plus de 20 ans […], mais nous avons mis au point des médicaments extraordinaires qui peuvent maintenant guérir presque tout le monde rapidement et en toute sécurité. »
L’hépatite C demeure à ce jour une épidémie mondiale. « Or, pour contrôler une telle épidémie, il faut un vaccin, dit-il. Après de nombreuses années de travail, je crois que le milieu estime que c’est faisable […]. À la University of Alberta, j’ai travaillé à une version améliorée [du vaccin] qui, nous croyons, a de bonnes chances de réussir, ou du moins d’être partiellement efficace. »
Houghton a été recruté par la University of Alberta en 2010 comme titulaire de la Chaire d’excellence en recherche du Canada sur la virologie à l’Institut Li Ka Shing de virologie. Deux ans plus tard, lui et son équipe ont mis au point un vaccin contre le virus responsable de la cirrhose, des maladies du foie terminales et du cancer du foie. Les tests du vaccin sont actuellement en phase avancée.
Il dirige aussi des travaux visant à mettre au point un vaccin contre la COVID-19.
Houghton raconte s’être intéressé à la microbiologie dès l’âge de 17 ans. « J’ai lu sur la vie et l’œuvre de Louis Pasteur, et ce dernier est devenu mon inspiration. » En ce qui concerne ce qui l’a motivé à poursuivre ses travaux, particulièrement pendant les années de frustration, il confie que ce n’est pas l’espoir d’obtenir des prix ou des décorations. « [Les hommages,] c’est bien, mais ce qui compte avant tout pour moi c’est d’avoir pu prévenir des millions de cas d’infection à l’hépatite C qui autrement auraient pu survenir par l’entremise des réserves de sang. Recevoir un prix c’est agréable, mais c’est ce n’est qu’un prix. Ce qui me rend vraiment heureux c’est de pouvoir intervenir auprès de patients, de prévenir les infections ou de trouver un remède. »
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Claire Kremen
Prix Volvo de l’environnement
BiologieClaire Kremen
Nourrir l’espèce humaine tout en protégeant la biodiversité
Prix Volvo de l’environnement
BiologieSelon Claire Kremen, l’appauvrissement de la biodiversité fait peser une menace comparable au changement climatique sur nos existences.
Cette biologiste de la conservation à la University of British Columbia déclare même au sujet des êtres vivants allant des microorganismes aux insectes qui nous entourent : « Nous ne pourrions pas nous nourrir sans le concours de ces nombreuses espèces qui rendent possible la production alimentaire. Nous ne pourrions pas non plus respirer ou avoir de l’eau pure sans biodiversité – il s’agit d’un maillon absolument essentiel à notre survie. »
Cependant, de nombreuses activités humaines ont des retombées catastrophiques sur ces organismes vivants pourtant nécessaires à notre écosystème, et ce, inutilement.
D’après Mme Kremen, ses travaux sur le maintien et l’amélioration de la biodiversité « ne sont pas uniquement menés dans l’intérêt de la biodiversité, mais de l’espèce humaine elle-même. » Les efforts qu’elle a déployés pour découvrir comment l’agriculture pouvait nourrir l’espèce humaine tout en protégeant la biodiversité lui ont d’ailleurs valu le prix Volvo de l’environnement 2020.
Après son doctorat sur la métamorphose des insectes, c’est la biodiversité qui s’est imposée comme le sujet de prédilection de la scientifique.
Pendant plus de 10 ans, elle a collaboré avec des organismes de protection de l’environnement à Madagascar, avant de joindre les rangs de l’Université de Stanford en Californie. Elle s’est alors intéressée à la manière dont les pratiques agricoles perturbent les pollinisateurs indigènes ainsi qu’à ce que pouvaient faire les agriculteurs et les citoyens pour les protéger et les préserver au sein des exploitations agricoles et aux environs.
« J’ai compris que la pérennité de l’agriculture est indissociable de la protection de ces êtres vivants qui fournissent des services écosystémiques, et que la situation est déterminée à la fois par les mesures mises en place par les agriculteurs pour favoriser ces services, ainsi que par ce qui se passe aux alentours des exploitations, » explique-t-elle.
D’après Mme Kremen, la fausse idée selon laquelle les mesures de conservation « nuisent aux rendements et ne sont pas viables économiquement » reste tenace.
Pourtant, les travaux de la chercheuse et de ses collègues ont montré que la production de 75 pour cent des produits agricoles que nous consommons est plus abondante grâce aux visites des pollinisateurs, et en particulier des pollinisateurs indigènes.
En outre, un paysage mixte comprenant une végétation indigène soutient l’action de ces insectes et peut ainsi augmenter le rendement des cultures.
Ce milieu naturel peut également aider les agriculteurs à réduire l’utilisation d’insecticides, tout en procurant un habitat pour les insectes et les oiseaux prédateurs des ravageurs. Au lieu de se fier uniquement aux produits chimiques, Mme Kremen propose en effet aux agriculteurs de recourir au « pouvoir de la nature » afin de lutter sans artifice contre les ravageurs et de diminuer, par la même occasion, leurs coûts de production.
Le prix Volvo, d’une valeur de plus de 220 000 $, attire l’attention sur la biodiversité et la réconciliation possible avec le monde agricole.
« Cette récompense donne de la crédibilité à l’idée fondamentale selon laquelle nous pouvons gérer nos paysages fonctionnels de façon beaucoup plus durable, tout en demeurant productifs et en fournissant à notre espèce des moyens suffisants de subsistance, » conclut Mme Kremen.
Les fonds obtenus seront consacrés à un nouveau programme interdisciplinaire qu’elle dirige à la University of British Columbia dans le but de proposer des solutions innovantes en matière de biodiversité.
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Adrian Liu
Bourse de recherche Sloan
CosmologieAdrian Liu
Dresser une carte 3D de l’Univers
Bourse de recherche Sloan
CosmologieSi notre Univers reste en grande partie inexploré, Adrian Liu entend bien changer la donne. Cosmologue à l’Institut spatial de McGill, il dirige en effet une équipe qui élabore la plus grande carte tridimensionnelle de l’Univers jamais réalisée.
« Grâce aux données issues d’une nouvelle génération de radiotélescopes, je cherche à comprendre comment les premières étoiles et les premières galaxies se sont formées. Au bout du compte, mon objectif est de réussir à cartographier une portion sans précédent de notre Univers observable, » explique le chercheur.
En 2020, ces travaux ont valu à M. Liu de remporter la bourse de recherche Sloan.
Cette cartographie permettra aux scientifiques de sonder la nature fondamentale de l’Univers et de comprendre comment il est né. M. Liu s’interroge : « Par exemple, les galaxies de première génération étaient-elles semblables à celles que nous observons aujourd’hui du point de vue de leur masse et de la luminosité de leurs rayons UV et X? Ou bien étaient-elles sensiblement différentes? Comment ces galaxies se sont-elles formées? Et une fois créées, quelles répercussions ont-elles eues sur leur environnement? Ces questions s’inscrivent toutes dans un objectif plus large qui vise à mieux comprendre la formation des galaxies. »
Le travail de M. Liu consiste notamment à cartographier la distribution des atomes neutres d’hydrogène qui émettent de faibles ondes radio. C’est grâce aux observations effectuées à l’aide d’immenses radiotélescopes que lui et son équipe parviennent à dresser une carte 3D de l’Univers.
« Même s’il faudra des décennies et de multiples instruments pour mener à bien un programme aussi ambitieux, de nombreuses questions se posent dès à présent avec acuité, indique le scientifique. Par exemple, on peut d’ores et déjà s’interroger sur les applications que pourrait avoir une carte si vaste de notre Univers. »
Selon M. Liu, ses recherches « se situent à la croisée de l’astrophysique et de la cosmologie, à la frontière entre observation et théorie. »
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Christian Marois
Bourse de recherche Guggenheim
AstronomieChristian Marois
Rechercher des planètes au-delà de notre système solaire
Bourse de recherche Guggenheim
AstronomieAlors que les chercheurs du monde entier se livrent à une véritable course pour photographier des planètes de masse toujours plus faible et repousser les limites de l’invisible, Christian Marois et son équipe du Conseil national de recherches Canada (CNRC) disposeront bientôt d’un avantage de taille par rapport à leurs concurrents. En 2020, cet astronome de talent a en effet obtenu une bourse de recherche Guggenheim qui servira à financer l’équipement de pointe dont son équipe a besoin pour faire progresser ses travaux.
Marois, chercheur à l’Institut Herzberg d’astrophysique du CNRC à Victoria, est en quête de nouvelles exoplanètes, ces planètes analogues à celles de notre propre système solaire et qui gravitent autour d’une autre étoile que le Soleil. Mais pour pouvoir les observer, le défi consiste à éliminer la luminosité de ces étoiles – tout comme notre Soleil nous fait parfois plisser les yeux pour voir des objets pourtant juste devant nous.
Le nouvel équipement est destiné à tester des prototypes d’instruments inédits qui, espèrent les chercheurs, permettront de mieux bloquer ces lumières vives et de percevoir nettement les petites exoplanètes en orbite autour des étoiles.
Quand M. Marois parle de son métier, on a véritablement le sentiment qu’il ne s’agit pas du tout d’un travail pour lui, mais qu’il réalise son rêve. « L’astronomie est une passion depuis ma plus tendre enfance, » confie-t-il. « C’est un sujet qui a toujours attisé ma curiosité. »
« Quand j’avais environ cinq ans, je me souviens d’avoir demandé pourquoi on pouvait voir la lune en plein jour alors que, dans la plupart des livres pour enfants, elle n’apparaissait que la nuit. Puis, c’est le ciel qui a commencé à m’intriguer. Dans les années 1970, je me rappelle avoir vu une éclipse à travers une boîte à chaussures que ma mère avait adaptée pour l’occasion. »
Alors qu’il était étudiant aux cycles supérieurs, le domaine n’en était encore qu’à ses balbutiements. Il explique : « Avant ça, dans les années 1970 et 1980, l’idée même de rechercher des planètes autour d’autres étoiles suscitait un certain scepticisme. »
Au cours des 25 dernières années, M. Marois et son équipe ont été à l’origine de découvertes majeures. Pour l’heure, les chercheurs ne peuvent étudier « [que des planètes] de la taille de Jupiter, pas encore celle de la Terre. » Ils doivent également se cantonner aux planètes plus jeunes dont la détection est facilitée par l’intensité de l’énergie lumineuse qu’elles dégagent.
Au cours de la prochaine décennie, lorsque des télescopes de 30 m de diamètre seront opérationnels, les chercheurs espèrent pouvoir observer des exoplanètes plus anciennes et de plus faible masse afin d’étudier davantage de planètes semblables à la Terre.
« Cette bourse de recherche Guggenheim est d’une importance capitale pour nous, car elle nous permet de soumettre l’objet de notre travail aux observations par télescope et de valider ainsi les résultats que nous avons obtenus jusqu’ici. C’est une étape cruciale pour que, dans 10 ans, il existe de nouvelles technologies permettant de détecter la vie sur une exoplanète, » ajoute M. Marois.
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Shaylih Muehlmann
Bourse de recherche Guggenheim
AnthropologieShaylih Muehlmann
Une chercheuse inspirée par la résilience des femmes mexicaines
Bourse de recherche Guggenheim
AnthropologieDans le cadre de ses recherches sur la guerre aux stupéfiants au Mexique, Shaylih Muehlmann ne se cantonne pas aux faits divers qui font la une des journaux. Cette anthropologue, titulaire de la Chaire de recherche du Canada sur la langue, la culture et l’environnement à la University of British Columbia, étudie l’incidence de la violence sur la vie quotidienne.
« La violence touche absolument tout le monde, pas seulement les criminels, » déclare-t-elle.
En tant que lauréate 2020 de la bourse de recherche Guggenheim, Mme Muehlmann peut désormais donner un second souffle à ses travaux en les orientant sur les effets de la guerre aux stupéfiants sur les femmes.
« Des dizaines de milliers de femmes sont à la recherche d’êtres chers disparus à cause des conflits, » s’émeut Mme Muehlmann. « On pourrait penser qu’il incombe à l’État et à la police de les retrouver. Mais l’ampleur de la corruption gouvernementale au Mexique est telle que cette tâche est laissée aux femmes elles-mêmes. Je les trouve incroyablement inspirantes. »
Ce sont ses précédents travaux sur la pénurie de ressources hydriques qui valent aujourd’hui à Mme Muehlmann d’étudier ces questions.
Elle clarifie : « Lorsque je suis allée au Mexique pour la première fois, mes travaux s’intéressaient aux effets de la pénurie d’eau sur un village de pêcheurs, situé à ce qui était autrefois l’embouchure du fleuve Colorado. J’ai observé que ceux qui ne pouvaient plus pêcher se tournaient vers d’autres activités afin de gagner de l’argent. Pour les jeunes, c’était un des rares moyens de gravir l’échelle sociale. Et j’ai été sidérée de constater combien cette reconversion d’une partie de la population avait métamorphosé la communauté et sa culture. »
Elle poursuit : « Les enfants du village écoutaient des chansons à la gloire du trafic de stupéfiants. Les habitants portaient même des pendentifs en hommage au saint patron des narcotrafiquants. En fait, ces trafiquants de drogue soutiennent souvent des villages pauvres, y construisent des églises, et leur apportent de l’aide. Les habitants leur doivent en grande partie leur survie. »
« Mais j’ai aussi vu à quel point tout le monde avait peur. La rencontre avec ces femmes m’a marquée, se souvient-elle. Elles ont tant perdu… et pourtant, elles font preuve d’une ténacité et d’une résilience remarquables. »
Grâce à la dotation de la bourse, Mme Muehlmann pourra rédiger un ouvrage sur ses recherches et approfondir ses travaux sur le terrain.
Elle conclut : « Sur un autre plan, [l’obtention de la bourse Guggenheim] m’encourage beaucoup, d’autant que je travaille sur un sujet qui peut sembler extrêmement sombre. »
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Daniel Pauly
Prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA
BiologieDaniel Pauly
Using data to fight back against overfishing
Prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA
BiologieLa surpêche menace les stocks de poissons dans le monde entier. Pour résoudre le problème, il faut disposer de données exhaustives sur les prises, qui font généralement défaut dans les registres officiels. Daniel Pauly, professeur à la University of British Columbia et expert des sciences halieutiques le plus cité au monde, a consacré une grande partie de son existence à corriger la situation.
Lauréat de 2020 du prix « Aux confins du savoir » de la Fondation BBVA, dans la catégorie écologie et biologie de la conservation, M. Pauly est le fondateur du projet Sea Around Us à la University of British Columbia et a voué sa longue carrière à explorer le déclin mondial des stocks de poissons. À la remise de cette récompense, la Fondation BBVA a rendu hommage à sa « contribution fondamentale à notre compréhension des océans de la planète et à ses efforts pour protéger et conserver la biodiversité marine et les services écosystémiques des océans dans un monde en pleine mutation. »
Si les données sur la pêche se sont révélées insatisfaisantes par le passé, c’est parce qu’elles ne tenaient ni compte des poissons rejetés ni des prises des femmes, de la pêche artisanale, de la pêche illégale, de la pêche récréative et de la pêche côtière.
Au sujet de ces données officielles, M. Pauly explique : « Les pays ne rendent compte que de leurs prises industrielles. C’est aussi vrai pour le Canada. Nous n’envoyons aucune donnée sur l’Arctique. »
Pour combler cette lacune, M. Pauly a fait appel aux réseaux qu’il a mis en place au cours de ses nombreuses années de travail au Centre international pour la gestion des ressources aquatiques vivantes aux Philippines. Il a ainsi demandé à ses collègues du monde entier de compléter les données disponibles.
« Grâce à cet apport d’information, nous avons mis au point une énorme base de données et un site Web (www.seaaroundus.org) qui dressent un état des lieux bien plus réaliste que les données officielles, » explique M. Pauly.
Les résultats ont montré que les stocks diminuaient plus rapidement que ne l’indiquaient les statistiques officielles. Les nouvelles données, désormais en libre accès, permettent aux États de constater l’ampleur réelle de la surpêche au large de leurs côtes.
Sea Around Us s’ajoute à une autre grande réalisation de M. Pauly, à savoir une base de données et un site Web appelés FishBase (www.fishbase.org). Cette encyclopédie en ligne qui recense 40 000 espèces de poissons connaît un « succès monstre » et attire tous les mois des millions d’utilisateurs.
Dans les années à venir, M. Pauly dit vouloir se consacrer à la mise à jour de Sea Around Us et de FishBase. En parlant de ces projets, qui mobilisent 75 employés à temps plein partout dans le monde, il ajoute : « Des millions de personnes utilisent ces produits gratuits. Je dois les garder à jour et c’est ce qui me motive à continuer. »
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Chelsea Rochman
Bourse de recherche Sloan
Sciences de la merChelsea Rochman
Faire progresser la recherche sur les microplastiques dans l’eau
Bourse de recherche Sloan
Sciences de la merGrâce à sa bourse de recherche Sloan en sciences de la mer, Chelsea Rochman pourra étudier plus en détail la façon dont les microplastiques se déplacent dans les systèmes aquatiques ainsi que leurs répercussions sur les organismes vivants.
Cette écologiste de la University of Toronto a démarré ses recherches en se penchant sur la nature des plastiques au milieu de l’océan. Elle s’est alors aperçue que la plupart d’entre eux étaient des microplastiques.
« On retrouve des microplastiques dans presque tous les écosystèmes, et des centaines d’espèces en ingèrent. Je m’intéresse à la façon dont ils gagnent ces milieux parfois éloignés et à leurs conséquences sur les êtres vivants. »
Écologiste avant l’heure, Mme Rochman a commencé à s’intéresser aux déchets et à leurs dangers dès son enfance. « J’étais celle qui se portait volontaire pour les programmes de recyclage et qui allait ramasser les déchets. C’était déjà une passion, » se souvient-elle.
Alors qu’elle était étudiante au premier cycle, elle a pu approfondir ses connaissances sur l’écologie marine dans le cadre d’une expérience d’études en Australie. Elle explique : « En 2006, nous avons appris l’existence d’une zone de déchets flottants au milieu de l’océan. À l’époque, il existait très peu de données scientifiques sur le sujet. J’ai donc décidé d’obtenir un doctorat pour travailler sur cette question et, depuis, je n’ai jamais quitté le milieu universitaire. »
Dans les années à venir, elle compte poursuivre ses travaux de recherche sur les répercussions de la pollution par les plastiques sur les écosystèmes et la relation de cette pollution avec d’autres facteurs de stress, tels que le changement climatique.
Sa bourse de recherche Sloan lui permettra de mener une partie de ses travaux dans les réserves d’eau douce de la Région des lacs expérimentaux, située au nord de l’Ontario. Dans cet espace de recherche, Mme Rochman sera en mesure d’examiner l’écosystème dans son ensemble.
« Nous pourrons réaliser ces travaux de recherche à l’échelle d’un lac entier pour voir comment les microplastiques se déplacent dans l’écosystème et nuisent aux organismes aquatiques, » s’enthousiasme-t-elle.
Selon elle, les récompenses telles que la bourse de recherche Sloan « sont assorties d’un financement bienvenu, laissant aux chercheurs la liberté de se pencher sur les questions qui leur tiennent à cœur. » Elle conclut : « C’est valorisant parce que ça veut dire qu’on vous fait confiance. »
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Anna Shternshis
Bourse de recherche Guggenheim
MusiqueAnna Shternshis
Offrir une seconde vie à des chansons écrites par des victimes de l’Holocauste
Bourse de recherche Guggenheim
Musique« Certaines des premières sources qui documentent les atrocités nazies à l’encontre des Juifs en Union soviétique sont des chansons », explique Anna Shternshis, professeure en études yiddish dans le cadre du programme Al et Malka Green à la University of Toronto. Depuis cinq ans, elle fait revivre la musique yiddish composée pendant l’Holocauste. « Ces chansons ont été écrites par des témoins et parfois par des victimes qui n’ont jamais pu raconter leur histoire parce qu’elles ont été tuées. »
« Après l’effondrement de l’Union soviétique, les chercheurs ont eu accès à de nouveaux documents, entre autres à des chansons écrites en yiddish par des prisonniers dans les ghettos et les camps de concentration en Ukraine, » ajoute-t-elle. « Leurs auteurs ne les composaient parfois que quelques instants avant d’être fusillés. »
À l’origine, c’est Moisei Beregovsky, un ethnomusicologue à l’Académie des sciences d’Ukraine, qui a colligé ces chansons entre 1944 et 1947. Après la guerre, il est accusé d’avoir encouragé le nationalisme juif. Il est alors arrêté et son travail confisqué. À sa mort en 1961, il est persuadé que cet héritage est perdu à jamais, mais les documents refont finalement surface des décennies plus tard à la Bibliothèque nationale Vernadsky d’Ukraine à Kiev.
Lorsque Mme Shternshis commence à les étudier, elle souhaite faire entendre la voix de ces personnes qui ont vécu l’horreur de l’Holocauste pour que résonnent encore leurs histoires.
Son projet de recherche, financé par le CRSH, s’intéresse à la culture yiddish dans les régions de l’Union soviétique occupées par les nazis. Les chansons sont présentées pour la première fois lors d’une conférence universitaire à la University of Toronto au printemps 2015. Dix-sept morceaux sont ensuite repris sur un album, intitulé Yiddish Glory : The Lost Songs of World War II, qui est sélectionné pour concourir aux Grammy Awards en 2019. C’est la deuxième fois seulement que la Recording Academy accorde un tel honneur à un enregistrement en yiddish.
L’année suivante, Mme Shternshis reçoit une bourse de recherche Guggenheim pour ses travaux sur les chansons yiddish écrites par les enfants sous l’occupation nazie en Ukraine.
Ce financement lui permettra de prendre un congé afin de rédiger un livre et de créer un site Web rassemblant les enregistrements des chansons en plusieurs langues ainsi que des images des paroles originales en yiddish. Grâce à ses initiatives, elle espère que ces œuvres longtemps égarées pourront toucher de nouveaux publics.
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Douglas Stephan
Bourse Guggenheim
ChimieDouglas Stephan
Transformer le monde de la chimie
Bourse Guggenheim
ChimieDouglas Stephan est l’un des lauréats de 2020 de la bourse de recherche Guggenheim pour ses travaux révolutionnaires qui présentent la chimie sous un jour nouveau – et dont on commence seulement à mesurer les applications.
« Habituellement, lorsqu’on mélange un acide avec une base, on obtient de l’eau. Il existe des molécules qui ont à la fois des propriétés acides et basiques et, lorsqu’il y a réaction, elles font en règle générale la même chose; c’est-à-dire qu’elles interagissent, puis plus rien ne se passe. Mais nous nous sommes demandé ce qui se produirait si on rendait ces molécules si grosses qu’elles ne pouvaient plus s’assembler. Il s’est avéré qu’elles devenaient alors frustrées [le phénomène est d’ailleurs connu sous le nom de paires de Lewis frustrées] et qu’elles devaient se débarrasser de leur énergie potentielle d’une façon ou d’une autre. Pour ce faire, on a constaté qu’elles réagissaient avec d’autres molécules, » explique M. Stephan.
Il poursuit : « C’est-ce qui constitue le cœur de notre découverte. En effet, ces réactions et ces comportements étaient totalement inattendus. »
Jusqu’au jour où M. Stephan et son équipe ont fait cette découverte en 2015, on pensait qu’il fallait un métal pour obtenir une réaction avec l’hydrogène. « Nous avons montré qu’il suffisait en fait de molécules très simples. »
« C’est donc un revirement théorique total qui s’est effectué, » raconte le chercheur.
Cette découverte suscite déjà l’intérêt de l’industrie.
« Les applications présentent de nombreux intérêts, en particulier dans le secteur pharmaceutique, » explique M. Stephan. « Lorsqu’on synthétise un médicament complexe, on utilise un catalyseur métallique avant de devoir se débarrasser de ce dernier en raison de sa toxicité. Aujourd’hui, les entreprises consacrent environ 70 pour cent de leurs coûts de production à cette purification. Si elles parvenaient à se passer de métaux, elles réaliseraient donc une économie considérable. »
« Ce qui a été vraiment gratifiant, c’est de voir l’écho international qu’a trouvé ce concept. Les scientifiques l’appliquent d’une façon dont je n’aurais même pas pu imaginer. Au Royaume-Uni, certains sont allés jusqu’à fabriquer des matières plastiques à partir de paires de Lewis frustrées. »
Mais cette découverte ne se cantonne pas à l’hydrogène. M. Stephan affirme que le concept pourrait également fonctionner avec le C02 et que « ses répercussions sont encore bien plus larges. »
La bourse Guggenheim permettra à M. Stephan et à son équipe de s’appuyer sur ces recherches pour s’attaquer à des problèmes extrêmement complexes – et qui agitent depuis longtemps le milieu de la chimie.
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Jennifer Sunday
Bourse de recherche Sloan
BiologieJennifer Sunday
Étudier les espèces marines grâce aux traces qu’elles laissent derrière elles
Bourse de recherche Sloan
BiologiePuisque Jennifer Sunday a « grandi près de l’océan », sur la côte ouest canadienne, son rapport étroit avec les créatures qui l’habitent n’a rien de surprenant.
« C’est une partie de la nature que j’ai eu la chance de découvrir et dont je suis tombée amoureuse, » affirme-t-elle.
Professeure agrégée et boursière William Dawson au Département de biologie de l’Université McGill, à Montréal, Mme Sunday dirige The Sunday Lab, un organisme voué à l’étude de l’effet des changements climatiques sur la distribution de la biodiversité.
Ses travaux de recherche lui ont valu une bourse de recherche Alfred P. Sloan 2020. Cette bourse de 70 000 $ sur deux ans aidera son équipe à accélérer la mise au point de technologies visant à déterminer quelles espèces sont présentes dans une zone en étudiant l’ADN environnemental (ADNe) qu’elles laissent dans l’eau.
« La réaction des espèces aux changements climatiques est hautement complexe. Elle semble imprévisible, mais il y a une science à tout ça. » Mme Sunday explique que son laboratoire utilise la synthèse de données, la théorie et des expériences contrôlées pour étudier les conséquences, pour les humains, des changements de distribution des espèces, et les initiatives de conservation pour les atténuer. « Nous faisons des prédictions et les voyons se réaliser. »
« Nous ne pouvons pas savoir où concentrer nos efforts de conservation si nous n’arrivons pas prédire la répartition des espèces. »
Pour elle, la bourse Sloan signifie que son équipe pourra mettre en pratique ses travaux à une échelle beaucoup plus grande, grâce à de nouvelles technologies qui accéléreront la cueillette de données sur « la distribution des espèces et leur réaction aux changements climatiques. »
Cela inclut, dit-elle, la vérification de théories qui permettront à l’équipe d’être plus précise dans ses prédictions.
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Larry Towell
Bourse Guggenheim
PhotographieLarry Towell
Un photographe fait le récit de migrations forcées
Bourse Guggenheim
Photographie« S’il y a un fil conducteur dans l’ensemble de mon œuvre, je dirais qu’il s’agit de la dépossession des terres, de la façon dont les territoires façonnent l’identité des populations qui les occupent, de ce que deviennent les gens lorsqu’ils sont dépossédés de leurs terres et, par le fait même, de leur identité. »
C’est ainsi que le photographe Larry Towell présente ses travaux sur le site Web de Magnum Photos.
Bien connu pour sa couverture des conflits politiques en Ukraine, au Nicaragua, au Salvador, à Standing Rock, en Palestine et en Afghanistan, ce photographe, poète et spécialiste de l’histoire orale est le lauréat 2020 de la bourse Guggenheim en arts créatifs, dans la catégorie Photographie.
En 1988, M. Towell est devenu le premier Canadien admis chez Magnum Photos, la coopérative de photo internationale fondée en 1947 par Robert Capa et Henri Cartier-Bresson, dont il est devenu membre à part entière en 1993.
Ses photoreportages sont parus dans les pages du New York Times, de Life, de Rolling Stone et de nombreux autres magazines internationaux.
Il utilise tant la pellicule que le numérique, et considère que « le noir et blanc demeure la forme poétique de la photo. Le numérique se destine au moment présent, alors que le noir et blanc demande temps et amour. »
De 2008 à 2011, il s’est rendu cinq fois en Afghanistan pour photographier les effets de la guerre civile sur la société.
En 2015, sa photo intitulée Isaac’s first swim a figuré sur un timbre de Postes Canada.
Towell a publié 14 recueils de photos, de poésie et d’histoires orales, en plus de deux livres à paraître en 2021 et d’un autre prévu pour 2022. Il a également enregistré plusieurs disques de poésie et de chansons originales.
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Ila Varma
Bourse de recherche Sloan
MathématiqueIla Varma
Un prix qui aidera une mathématicienne à promouvoir l’équité en STGM
Bourse de recherche Sloan
MathématiqueLauréate en 2020 d’une bourse de recherche Sloan en mathématique, Ila Varma, professeure à la University of Toronto, s’emploie à résoudre des problèmes de longue date en statistique arithmétique – des énigmes que les mathématiciens tentent de percer depuis le xviiie siècle.
Pour résumer, ses travaux portent sur les entiers relatifs, dont nous apprenons les fondements à la petite école.
« Nous apprenons au primaire qu’il est possible de réduire en facteurs premiers n’importe quel nombre entier. Ainsi, un des principaux sujets de la théorie des nombres, ce que mes travaux visent à expliquer, porte sur les systèmes de nombres qui agissent comme des entiers relatifs, mais qui sont un peu plus compliqués. »
« Nous pouvons définir une notion de facteurs premiers pour ces grands systèmes de nombres, et nous cherchons à savoir à quelle fréquence chaque élément peut prendre la forme de ces facteurs premiers généralisés. Nous essayons de comprendre des choses assez fondamentales! »
« Ce qui m’a attirée vers cette discipline, c’est l’idée qu’il existe des mystères non résolus associés aux mathématiques de notre enfance, » explique Mme Varma. « Je considère ce que je fais comme une réflexion profonde sur des choses simples. Mais ces questions simples ne sont pas forcément faciles. Elles sont fondamentales par leur nature, car elles découlent de l’interaction entre l’addition et la multiplication. »
Mme Varma compte utiliser sa bourse Sloan pour agrandir son équipe travaillant sur ces problèmes et poursuivre ses efforts visant la diversité et l’équité dans le domaine des mathématiques. Elle s’inquiète particulièrement de la culture des départements de mathématiques et de ces effets disproportionnés sur les personnes issues de milieux marginalisés qui souhaitent étudier les mathématiques ou des disciplines connexes. La chercheuse souhaite contribuer à l’élimination des barrières qui, selon des chercheurs en sciences sociales, sont responsables de cette sous-représentation dans les domaines des STGM.
« Au fond, les mathématiques reposent sur une communauté d’êtres humains; ils font partie de l’aventure humaine. Les modes de pensée les plus diversifiés sont ceux qui permettent de résoudre les problèmes de mathématiques. Chaque personne devrait avoir une place pour faire le genre de mathématiques qu’elle souhaite faire. »
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Shannon Walsh
Bourse de recherche Guggenheim
CinémaShannon Walsh
La bourse de recherche Guggenheim aide une documentariste à faire avancer son projet de fiction
Bourse de recherche Guggenheim
CinémaShannon Walsh – réalisatrice, écrivaine et professeure agrégée au Département de théâtre et de cinéma de la University of British Columbia – a obtenu en 2020 une bourse de recherche Guggenheim pour son extraordinaire façon de raconter les histoires dans ses films.
Mme Walsh a écrit et réalisé quatre longs métrages documentaires primés : Illusions of Control (2019), Jeppe on a Friday (2013), À St-Henri, le 26 août (2011) et H2Oil (2009), ainsi que de nombreux courts métrages.
Elle achève actuellement son dernier documentaire, The Gig is Up, qui traite de l’économie à la demande et de ses répercussions sur le monde du travail. « J’aime me plonger dans toutes sortes de questions sociales pour les porter à la connaissance du public, » explique-t-elle. Ses anciens projets l’ont amenée à étudier différents paysages dévastés autour du globe, dont les sables bitumineux de l’Alberta.
La bourse de recherche Guggenheim l’aidera à financer son prochain film de fiction qui sera tourné en 2023.
« Ce qui m’intéresse, ce sont les histoires que personne ne raconte et tous ces détails de la vie quotidienne qui nous permettent de mieux appréhender le monde dans lequel nous habitons et les problèmes sociaux qui nous touchent, » indique-t-elle. « J’essaie de mettre en lumière des moyens qui pourraient nous aider à changer le monde qui nous entoure, en tenant toujours compte des personnes les plus touchées. Je pense que c’est le fil conducteur de tout mon travail. C’est d’ailleurs en grande partie ce qui me motive et me passionne. »
Au sujet de la bourse Guggenheim, Mme Walsh déclare : « Je me sens soutenue en tant que créatrice, et c’est pour moi un immense honneur. C’est aussi le signe que l’on croit en mon processus artistique […] Mais maintenant, je dois continuer à me montrer digne de ce prix. »
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Robert Zatorre
Prix C. L. de Carvalho-Heineken en sciences cognitives
NeurosciencesRobert Zatorre
La musique et le cerveau : à la recherche d’applications thérapeutiques
Prix C. L. de Carvalho-Heineken en sciences cognitives
NeurosciencesEn plus d’être neuroscientifique de la cognition à l’Université McGill, Robert Zatorre est aussi musicien. Il est donc bien placé pour étudier le fonctionnement du cerveau humain grâce à la musique.
Assorti d’une bourse de 200 000 $ US, le prix C. L. de Carvalho-Heineken en sciences cognitives qu’il a remporté cette année l’aidera à poursuivre ses travaux.
« Nous avons découvert que la musique active les mêmes circuits cérébraux que d’autres stimulus biologiques importants, comme la nourriture et l’activité sexuelle. L’effet se compare aussi à celui de certaines drogues addictives. La musique agit sur les mêmes systèmes. »
Les expériences de M. Zatorre portent sur la science fondamentale derrière ces interactions : les circuits cérébraux et leurs propriétés fondamentales. Ses travaux de recherche laissent présager d’intéressantes applications potentielles.
Par exemple, M. Zatorre étudie actuellement comment le phénomène de récompense attribuable à la musique dans le cerveau pourrait servir à concevoir des techniques pour aider les personnes ayant du mal à réguler leur système de récompense. Les personnes souffrant de la maladie de Parkinson par exemple éprouvent souvent des problèmes de motivation pouvant mener à la dépression.
« Nous voulons savoir s’il est possible d’utiliser la musique pour les aider à stimuler leurs émotions. Notre objectif est d’utiliser un signal cérébral pour rendre la musique plus agréable à l’écoute. »
Zatorre est fier de voir de nombreux anciens étudiants travailler sur d’autres problèmes concrets. « Une de mes anciennes étudiantes explore le rôle potentiel de la rétroaction assistée par la musique dans la réadaptation après un AVC. Les mouvements du corps sont étroitement liés aux sons produits. Elle étudie donc les moyens d’utiliser ce savoir pour améliorer les mouvements des victimes d’AVC. »
Le prix C. L. de Carvalho-Heineken en sciences cognitives est une récompense personnelle, ce qui signifie que l’utilisation de la bourse n’est soumise à aucune restriction. M. Zatorre a décidé de l’injecter dans un fonds de recherche qui lui permettra d’embaucher plus de jeunes chercheurs pour l’aider dans ses travaux.
« Je peux m’en servir pour n’importe quelle idée folle. Je n’ai de permission à demander à personne. Et c’est l’essence de la science […] Les plus grandes découvertes sont toutes le fruit de l’idée folle de quelqu’un. »