Mémoire d’Universités Canada présenté au Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration
![Petits drapeaux du Canada sur un fond flou de la ville](https://univcan.ca/wp-content/uploads/2024/12/Flags-CIMMSubmission.jpeg)
À la croisée des chemins : renforcer le rôle du Canada comme un pôle d’attraction mondial des talents
CanLe Canada se trouve à une croisée des chemins. Afin d’asseoir sa position à titre de destination de choix pour les talents du monde entier, des mesures décisives doivent être prises. La décision du gouvernement fédéral de réduire le nombre d’étudiantes et d’étudiants étrangers au pays au cours des prochaines années risque de priver le Canada de personnes hautement talentueuses ayant le potentiel de stimuler la croissance économique, de pallier la pénurie de main-d’œuvre et d’assurer la prospérité future.
Au moment où le pays a besoin plus que jamais des talents étrangers, les tendances récentes révèlent un déclin inquiétant de l’intérêt de ces derniers pour les études et la recherche en sol canadien. Les changements de politiques du gouvernement fédéral ont entaché la réputation internationale du pays à titre de destination primée pour les études postsecondaires.
Bien qu’il soit compréhensible que le gouvernement veuille alléger les pressions exercées sur les secteurs du logement et de l’immigration, le caractère radical et uniforme des récentes décisions politiques a des conséquences collatérales à grande échelle. Par ailleurs, l’inefficacité, la lenteur et le manque de transparence du processus de traitement des demandes de permis d’études a un effet dissuasif pour les étudiantes et étudiants ainsi que les chercheuses et chercheurs étrangers. Cette situation nuit à la capacité du Canada d’attirer les talents nécessaires pour affronter les problèmes économiques et démographiques.
Les étudiantes et étudiants étrangers permettent entre autres de renforcer les activités de recherche et d’innovation au pays. Les universités jouent un rôle crucial pour permettre à la population étudiante et aux chercheuses et chercheurs d’acquérir les compétences indispensables pour faire avancer de grands dossiers comme le développement de pratiques d’agriculture durable pour nourrir une population mondiale croissante et l’intelligence artificielle (IA). Au-delà de son effet positif pour l’économie canadienne, le travail fait dans les universités du pays change la donne partout dans le monde.
Au Manitoba, par exemple, les travaux de Mark Belmonte sur la moisissure blanche, dévastatrice pour les cultures de canola, permettent de protéger un produit canadien exporté partout dans le monde. Au Québec, l’équipe de Monia Rekik à l’Université Laval développe avec l’IA des algorithmes qui permettraient à 300 000 Canadiennes et Canadiens vivant avec le diabète de type 1 de jouir d’une liberté et de mener une vie en toute sécurité.
Au-delà des retombées immédiates, les laboratoires de recherche des universités canadiennes sont des lieux deformation incontournable de la prochaine génération de talents novateurs, renouvelant la main-d’œuvre hautement qualifiée nécessaire à l’existence d’emplois bien rémunérés et à l’accroissement des investissements à la hauteur des principes canadiens et de la qualité de vie attendue.
Ces changements couplés à l’incertitude actuelle nuisent aux établissements et à la réputation du pays. Le système d’éducation international a besoin de temps pour s’adapter aux nouvelles politiques et en évaluer les effets à long terme.
Les répercussions de ces changements ne touchent pas uniquement la population étudiante étrangère. À la vérité, c’est l’ensemble de la communauté universitaire et des collectivités canadiennes qui en subit les contrecoups. Aux budgets déjà serrés s’est ajouté un fardeau financier découlant de la diminution des inscriptions provenant de l’étranger — une importante source de revenue — qui a forcé les établissements à prendre des décisions financières difficiles, notamment en procédant à des licenciements, en réduisant leur offre de programmes et en offrant une expérience étudiante de moindre qualité.
Parmi ces décisions difficiles, on retrouve les suivantes :
- La University of Windsor a annoncé qu’elle ferait des mises à pied et qu’elle sabrerait des programmes pour compenser les pertes de revenus de dix millions de dollars associés aux droits de scolarité des étudiantes et étudiants étrangers.
- La Thompson Rivers University a renoncé à des postes d’enseignement à contrat et prévoit d’autres coupes budgétaires. Un nombre moindre d’étudiantes et d’étudiants aux cycles supérieurs auront ainsi la chance de donner des cours et de développer leurs compétences en enseignement.
- La University of Winnipeg a annoncé un gel de l’embauche, ce qui signifie que les membres du corps enseignant ne peuvent pas prendre d’auxiliaires d’enseignement à leur service pour faciliter la gestion des cours de plus de 200 personnes.
En plus d’embaucher du personnel universitaire, les universités emploient également des personnes chargées des services administratifs, des technologies de l’information, des services de conseils de carrière, de l’entretien des installations, des bibliothèques, de la gestion de programmes de bourses d’études ou autres, et des services de santé mentale. Par les divers services qu’elles offrent, ces personnes améliorent l’expérience étudiante. Elles offrent également de précieux conseils professionnels et favorisent l’établissement de liens entre les diplômées et diplômés, contribuant ainsi à leur réussite.
Le Canada est confronté à des défis économiques urgents, à savoir une faible productivité et une population vieillissante. Alors qu’il était jadis un chef de file au chapitre de la productivité, le pays se classe maintenant au 29e rang parmi les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et on prévoit qu’il sera à la traîne de tous les pays membres entre 2030 et 2060. Parallèlement, les départs à la retraite, qui représenteront 63 % des huit millions de postes à pourvoir d’ici 2031, exercent une pression sur les finances publiques qui se traduit par une hausse des coûts des soins de santé et une pénurie de main-d’œuvre. Ayant généré 7,4 milliards de dollars en recettes fiscales en 2022, les étudiantes et étudiants étrangers forment un bassin de jeunes travailleuses et travailleurs qualifiés et formés dans les universités canadiennes qui peuvent contribuer à redresser la situation au pays.
Le gouvernement doit s’affairer à restaurer la réputation bien méritée du Canada en tant que pôle d’attraction des esprits les plus brillants du monde. La concurrence est féroce : le Canada ne peut se permettre de se laisser distancer. Il ne peut se permettre de faire une croix sur les talents d’ailleurs ni de perdre du terrain en recherche de pointe et en attraction des investissements.
Il a fallu au Canada des décennies pour se forger une réputation de destination de choix pour les études, la formation et les débouchés.
Il serait malheureux de tout gâcher en misant sur des politiques malavisées adoptées au gré des humeurs.
Une voie à suivre
Le gouvernement du Canada doit communiquer de toute urgence les allocations de lettre d’attestation provinciale pour mettre fin aux perturbations. En outre, Universités Canada lui recommande de prendre les trois mesures suivantes pour rectifier la situation actuelle et assurer l’avenir du pays :
- Élaborer une stratégie pancanadienne durable d’immigration.
Pour rétablir la réputation internationale du Canada comme une destination de choix pour les études, le gouvernement fédéral doit développer une stratégie pancanadienne durable d’immigration conforme à ses aspirations socioéconomiques. L’adoption d’une démarche pangouvernementale qui requiert la collaboration de l’ensemble des ministères fédéraux et des divers ordres du gouvernement est essentielle pour garantir que les politiques d’immigration favorisent la productivité, servent la population vieillissante et attirent les talents étrangers. - Moderniser le système d’immigration du Canada.
Accélérer la modernisation de la plateforme numérique d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada améliorera les temps de traitement des demandes de permis d’études et l’échange de données et permettra aux établissements de prendre des décisions éclairées. En réduisant les retards et les inefficacités, le Canada pourra ainsi attirer les talents étrangers avant que les pays concurrents ne profitent de ses lacunes. - Mettre en œuvre le cadre pour les établissements reconnus.
Le cadre pour les établissements reconnus (CER) est la solution pour simplifier le traitement des demandes de permis d’études pour les établissements qui doivent respecter des normes élevées en matière de soutien, de logement et de recrutement éthique. L’approche fondée sur les résultats et les données du CER peut améliorer l’imputabilité et faire en sorte que les petites universités et régions en profitent.