Les universités au coeur d’un monde et d’un Canada en transformation

25 octobre 2018
Mike Mahon speaks to Universities Canada members.

LE TEXTE PRONONCÉ FAIT FOI

Allocution par Mike Mahon, Président du conseil d’administration d’Universités Canada, recteur et vice-chancelier de la University of Lethbridge

Oki, ni Kso Koo wa wa, qui signifie bienvenue chez les Pieds-Noirs, est une formule que nous prononçons au début de chaque cérémonie à la University of Lethbridge et que je dis aujourd’hui en signe de respect puisque nous sommes réunis ici sur les terres ancestrales du peuple Algonquin.

Bon après-midi,

Merci à tous de votre présence à cette 28e réunion d’automne des membres. C’est un plaisir de voir tous ces visages connus et moins connus. Je suis particulièrement heureux de souhaiter la bienvenue à nos amis et partenaires du milieu de l’enseignement supérieur qui sont avec nous aujourd’hui.

J’attendais ce moment avec beaucoup d’impatience. Une année s’est écoulée depuis que j’ai été nommé président du conseil d’administration d’Universités Canada, et j’ai l’occasion pour la première fois de m’adresser à vous dans un cadre plus officiel.

Mais d’abord faut-il savoir par où commencer. Il y a tant de sujets à aborder.

Je pense que, de tout temps, les gens se sont plu à dire qu’ils vivaient à une époque intéressante en regardant le monde qui les entourait. L’aspect perpétuel du changement est ce qui garantit en quelque sorte que les choses restent intéressantes.

C’est tout particulièrement vrai à notre époque marquée par la complexité et l’ampleur des défis et par les multiples possibilités qui s’offrent à nous sur les plans individuel, national et international.

L’automatisation, l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique transforment pratiquement toutes les industries.

Nous cherchons sans cesse à faire des avancées technologiques, à innover et à améliorer la productivité.

Et c’est sans compter tout ce qui est hors de notre contrôle.

Nous sommes témoins de feux de forêt et d’ouragans dévastateurs, de la hausse du niveau de la mer et de la fonte des glaces aux deux pôles.

Selon la Banque mondiale, les effets des changements climatiques pourraient forcer le déplacement de plus de 140 millions de personnes d’ici 2050 – en plus des millions d’autres que les conflits obligent actuellement à migrer.

Certains fuient aussi une pauvreté abjecte et partent en quête d’une vie meilleure.

Devant l’ampleur de cette migration humaine, des pays ferment leurs frontières.

Les politiques de division sont omniprésentes. Comme Canadiens, nous avons tendance à nous penser à l’abri, mais nous avons nos divisions, nous aussi, et certaines se creusent de plus en plus.

Face à tous ces enjeux, il serait facile de céder à la consternation et même à la peur.

C’est là que les universités canadiennes doivent entrer en jeu pour permettre à tous d’écouter, d’apprendre les uns des autres et de travailler ensemble pour donner du sens à tous ces bouleversements.

Le Dialogue transatlantique sur l’éducation supérieure tenu cette année à Florence, et auquel sept membres d’Universités Canada ont assisté, a mis en lumière le message d’espoir que portent les universités. Les participants ont parlé de la nécessité pour les universités d’aujourd’hui d’être inclusives, engagées dans la société et dignes de confiance.

Ces valeurs sont la clé d’un changement culturel positif et de la création de sociétés ouvertes et démocratiques.

L’université a toujours été un endroit où tenir des débats difficiles, mais importants. C’est d’ailleurs une des raisons qui rendent son autonomie aussi essentielle. En tant qu’établissements indépendants, les universités favorisent une saine démocratie en empêchant les enjeux importants de tomber dans l’oubli et en faisant en sorte que tout le monde, y compris les minorités, puisse s’exprimer.

Nous nous plaisons à voir Universités Canada comme un grand chapiteau où chacun peut participer à la conversation. Nous représentons des universités de toutes les tailles, aux champs d’intérêts et d’expertise variés. Nous collaborons étroitement avec nos partenaires du secteur collégial, du milieu des affaires, du gouvernement et des organismes communautaires.

Le lien qui unit les universités à leur collectivité joue un rôle essentiel, peut-être même plus que jamais auparavant.

Les effets positifs des universités sur leurs collectivités et au sein de celles-ci sont nombreux.

Nul besoin d’aller très loin pour le constater.

Montréal se trouve régulièrement dans la liste des 10 meilleures villes universitaires au monde au classement QS. L’année dernière, elle a même obtenu la première place. Cette reconnaissance est partiellement attribuable à la façon dont les nombreux établissements universitaires et collégiaux de la ville, anglophones et francophones, sont intégrés à la collectivité.

Ce phénomène s’observe dans de nombreuses collectivités canadiennes, petites et grandes.

Universités Canada tente d’obtenir, pour tous les établissements d’enseignement supérieur, les conditions dont ils ont besoin pour contribuer le plus pleinement possible à la société.

À la suite de la publication du rapport Naylor en 2017, nous avons d’ailleurs fait pression en faveur du financement fédéral de la recherche. Nous croyons que nos efforts ont eu une incidence directe sur le budget de 2018, qui a accordé des investissements historiques en sciences et en recherche universitaire.

Avec un financement prévu de près de quatre milliards de dollars et des engagements pluriannuels, le budget de 2018 indique clairement que la recherche universitaire importe. Nous nous sommes particulièrement réjouis de voir qu’un soutien était expressément prévu pour les femmes, les chercheurs en début de carrière et d’autres groupes souvent sous-financés.

Alors que le gouvernement fédéral cherche à diversifier et à maximiser ses accords commerciaux, il est essentiel d’exploiter notre plein potentiel sur les plans de la recherche, de la découverte et de l’innovation.

Nous continuerons donc à travailler avec le gouvernement fédéral pour tirer parti de la capacité des universités à faire progresser le Canada.

J’ai évoqué plus tôt l’image d’un grand chapiteau, mais j’aurais aussi pu parler d’un immense porte-voix. Après tout, Universités Canada est le porte-parole des universités du pays, comme le dit si bien son site Web.

Cela ne signifie pas pour autant que nous parlons pour nos membres, mais plutôt que nous amplifions leurs messages, et donc aussi les vôtres, que vous soyez un recteur, un chercheur sur le point de faire une découverte révolutionnaire ou un étudiant passionné par l’avenir.

Nous nous engageons à écouter et à mettre en lumière ceux qui ont généralement du mal à se faire entendre : les femmes, les Autochtones et les personnes handicapées, entre autres.

Nous prêtons une oreille attentive à chacune de ces voix, et nous continuerons de le faire.

Notre collaboration s’étend aussi au-delà de nos frontières, entre autres avec l’American Council on Education, l’Association européenne de l’université, l’Association des recteurs mexicains et l’Asia-Pacific Association for International Education.

Après tout, nous savons que nous faisons partie d’un réseau mondial. C’est le cas d’Universités Canada et des établissements d’enseignement supérieur du pays. C’est aussi le cas des étudiants canadiens, c’est pourquoi ils doivent être plus nombreux à tisser des liens et à avoir des expériences d’apprentissage à l’étranger.

La recherche a démontré que les études à l’étranger sont extrêmement bénéfiques à tous les étudiants, particulièrement aux étudiants moins avantagés, comme les Autochtones, les étudiants de première génération et les personnes handicapées.

Prenons l’exemple de Maya Many Grey Horses. Cette étudiante de la University of Lethbridge parle de son séjour de l’été dernier en Afrique du Sud comme d’une expérience transformatrice. Elle s’est jointe à nous hier soir, à l’occasion de la réception Retrouvailles 2018 destinée aux parlementaires.

Ce qui est toutefois préoccupant, c’est qu’à peine 11 pour cent des étudiants canadiens au premier cycle ont la chance de faire un séjour d’études à l’étranger, et la plupart d’entre eux le font dans des pays traditionnellement anglophones ou francophones.

De nombreux pays multiplient les initiatives d’études à l’étranger. Nous aussi devons préparer nos étudiants à se tailler une place sur la scène mondiale.

C’est pourquoi nous collaborons au programme de bourses de la reine Elizabeth II (BRE) avec les Fondations communautaires du Canada et la Fondation Rideau Hall. Depuis son lancement en 2014, le programme BRE a permis à près de 1 200 étudiants canadiens de faire des séjours d’études dans 50 pays.

L’automne dernier, le Groupe d’étude sur l’éducation mondiale a lancé un rapport fracassant contenant une mise en garde et un appel à l’action. Des dirigeants d’entreprises et de la société civile y affirmaient que le Canada ne prépare pas bien ses jeunes à relever les défis d’un monde en évolution rapide.

Idéalement, nous souhaiterions que la proportion d’étudiants qui font un séjour à l’étranger atteigne au moins 25 pour cent au cours des dix prochaines années, et nous aimerions voir ces étudiants choisir plus souvent des destinations comme l’Asie, l’Amérique latine ou l’Afrique.

Comme je l’ai mentionné, un des thèmes principaux du Dialogue transatlantique de cette année était la nécessité pour les universités d’être inclusives, engagées dans la société et dignes de confiance au sein de la collectivité. Comme ces enjeux faisaient déjà partie de nos priorités, nous avons lancé, avec le soutien de la Fondation McConnell, une initiative pancanadienne visant à définir, à mesurer et à accroître les retombées sociales des universités dans leur collectivité.

Les changements climatiques, l’inégalité des revenus, les défis en matière de soins de santé et les bouleversements économiques ne sont que quelques exemples des menaces qui guettent nos collectivités. Ces dernières doivent absolument collaborer avec les universités pour résoudre ces problèmes et aider les étudiants à se préparer pour l’avenir.

D’ailleurs, je pense que le concept de collectivité vaut la peine qu’on s’y attarde un instant, car il peut être plutôt abstrait.

Nous parlons parfois de « la collectivité » comme d’une chose concrète, alors qu’elle revêt en réalité plusieurs visages. Il existe une multitude de collectivités aussi particulières les unes que les autres, et chacune avec ses propres besoins.

Les collectivités autochtones sont du nombre.

Je suis fier de pouvoir dire qu’Universités Canada continue de mettre en œuvre les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation.

Mais il faut en faire encore plus. Un peu moins de 11 pour cent des Autochtones du Canada sont titulaires d’un diplôme universitaire, alors que cette proportion s’élève à plus de 25 pour cent dans le reste de la population. Cet écart est lourd de conséquences, car les Autochtones possédant un diplôme sont jusqu’à 60 pour cent mieux rémunérés que ceux qui n’en ont pas. En outre, l’éducation, que les Pieds-Noirs de l’Alberta surnomment « le nouveau bison », est la voie à suivre pour assurer le développement des collectivités autochtones.

Nous travaillons donc activement pour faire progresser la réconciliation grâce à l’éducation. Depuis 2013, le nombre de programmes universitaires axés sur les questions autochtones ou spécialement conçus pour les étudiants autochtones a progressé de 55 pour cent.

Plus de la moitié des universités du Canada collaborent maintenant avec des collectivités autochtones pour enseigner les langues autochtones, et un nombre croissant d’entre elles offrent des cours sur des sujets variés en langue autochtone. Les programmes de mentorat autochtones prennent de l’ampleur, et des aînés offrent des conseils et du soutien sur de nombreux campus. De plus, 78 pour cent des universités canadiennes favorisent l’engagement interculturel entre les étudiants et le personnel en offrant des activités comme des cercles de discussion et des formations sur la réconciliation.

Il n’en demeure pas moins urgent d’augmenter le soutien financier offert aux étudiants autochtones afin de leur donner une chance équitable de réaliser leur potentiel. Nous poursuivons nos efforts à cet égard.

Lorsqu’il est question de préparer tous les étudiants pour l’avenir, l’apprentissage par l’expérience est essentiel. Et les étudiants de notre panel l’ont confirmé ce matin.

L’apprentissage intégré au travail stimule la créativité des étudiants, leur capacité d’adaptation et leurs aptitudes en résolution de problème et en communication. Il contribue aussi au réseautage essentiel à l’avancement professionnel, comme l’ont dit les étudiants.

De concert avec la Table ronde du milieu des affaires et de l’enseignement supérieur, nous demandons à ce que tous les étudiants de niveau postsecondaire du Canada aient accès à des expériences d’apprentissage intégré au travail.

Nous devons aussi offrir aux Canadiens sur le marché du travail l’occasion de se recycler et de parfaire leurs compétences.

Des études indiquent que la moitié des emplois au pays changeront tellement au cours des dix prochaines années qu’ils nécessiteront de toutes nouvelles compétences, entraînant une augmentation des besoins en perfectionnement. Ainsi, les universités innovent en éducation permanente afin de répondre à ces besoins en constante évolution.

À titre d’exemple, le programme de soins infirmiers de la Nipissing University cible les travailleurs de divers horizons qui souhaitent se réorienter en milieu de carrière. Dans le contexte du vieillissement de la population, il s’agit d’un domaine en demande qui présente un faible risque d’automatisation.

Tous ces changements surviennent dans un souci d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI). Pour surmonter les défis qui attendent le marché du travail canadien, nous devons donner à tout le monde une chance équitable de participer et de réaliser son potentiel.

L’année dernière, les universités canadiennes se sont publiquement et explicitement engagées à promouvoir l’EDI tant dans le milieu universitaire que dans l’ensemble de la société. Nos 96 membres ont adhéré aux sept principes d’excellence en matière d’inclusion pour donner suite aux Principes en matière d’éducation des Autochtones de 2015.

Notre engagement à cet égard s’incarne dans un plan d’action quinquennal, que nous ferons progresser cette semaine lors d’une rencontre entre des rectrices et des parlementaires, qui discuteront de leurs expériences et de leurs idées concernant les défis sexospécifiques du leadership. Nous lancerons aussi un nouvel outil en ligne pour partager les réussites et les énoncés de principes des membres en matière d’EDI.

Plus tard cet automne, nous réaliserons aussi notre premier sondage auprès des universités pour mesurer et comparer les efforts et les réussites en matière d’EDI à l’échelle du Canada.

Pour répondre aux nouveaux besoins du marché du travail, il faudra aussi élargir les connaissances au-delà des limites traditionnelles. La multidisciplinarité ouvrira la voie à de nouvelles découvertes et innovations. Plusieurs exemples en témoignent.

Le changement s’amorce déjà dans mon propre établissement à Lethbridge. Nous avons combiné nos expertises en neuroscience et en éducation préscolaire pour concevoir un programme de maîtrise qui consiste à doter les étudiants d’une connaissance approfondie du fonctionnement du cerveau pour enrichir les méthodes d’enseignement aux jeunes enfants.

De toute évidence, le Canada de demain sera différent de ce qu’il est aujourd’hui. Les changements actuels donnent déjà le vertige, et les gens sont de plus en plus en quête de points de repère ou de sources d’espoir.

Heureusement, les Canadiens croient toujours en nous, les universités. Lors d’une récente étude menée par Abacus Research au Canada, 77 pour cent des participants ont indiqué trouver la recherche universitaire utile. Et selon 83 pour cent d’entre eux, les études universitaires ont depuis longtemps prouvé leur valeur dans le monde.

Nous continuerons de travailler fort afin de mériter cette confiance. Nous garderons le cap sur notre mission fondamentale, c’est-à-dire améliorer le bien-être au sein de la société grâce à l’éducation, à la recherche, à l’innovation, au dialogue et à la diversité.

En juin, le conseil d’administration a adopté un nouveau plan d’action énonçant nos priorités pour les cinq prochaines années. Nous l’avons présenté à nos membres ce matin. Il témoigne de l’importance que nous accordons aux partenariats, à la collaboration et à notre leadership sur le plan du changement.

Nous continuerons d’écouter et de soutenir les collectivités autochtones, de même que de favoriser la mobilité étudiante et la diversité au sein du milieu universitaire.

Universités Canada continuera de promouvoir l’autonomie des universités. Et nous ouvrirons grand la porte, afin que tous ceux qui le souhaitent puissent se joindre à nous et collaborer pour créer le meilleur pays possible.

En résumé, je dirais que nous vivons effectivement à une époque intéressante. Le milieu universitaire canadien est prêt à en tirer le maximum en innovant.

Notre feuille de route est jalonnée de réussites. Les universités canadiennes ont offert au monde des découvertes qui sauvent des vies, des avancées technologiques qui font prospérer des entreprises et des innovations sociales qui renforcent les collectivités.

Nos universités accueillent des professeurs et des chercheurs exceptionnels, comme Donna Strickland de la University of Waterloo, qui est récemment devenue la troisième femme de l’histoire à recevoir un prix Nobel de physique.

Nous avons les bonnes personnes et la bonne volonté nécessaires pour en faire plus.

Nous savons aussi que les meilleurs résultats s’obtiennent en collaborant.

J’invite donc tous nos partenaires, qu’ils se trouvent ici dans cette pièce ou ailleurs au Canada, à resserrer leurs liens avec nous en cette période de turbulence.

Ensemble, nous pouvons préparer une nouvelle génération pour le monde qui les attend.

Ensemble, nous pouvons bâtir un Canada encore meilleur.

Merci.

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