La prochaine ère de projets porteurs pour le Canada repose sur les innovations en IA et en informatique quantique

06 octobre 2025
Deux chercheurs en physique quantique travaillant dans un laboratoire de l'University of Calgary.

Par : Gabriel Miller, président-directeur général, Universités Canada

Cet article a été publié dans le Hill Times le 24 septembre 2025.


Par sa décision d’accélérer les projets d’intérêt national, comme un projet de gaz naturel liquéfié au nord de la Colombie-Britannique et un projet nucléaire en Ontario, le premier ministre Mark Carney témoigne d’une volonté ferme de refaçonner les bases économiques du Canada. Or, les infrastructures traditionnelles ne suffiront pas. La prospérité du pays dépend désormais de sa maîtrise des révolutions de l’intelligence artificielle (IA) et de l’informatique quantique, qui transforment déjà chaque secteur, y compris les projets visés par l’initiative gouvernementale.

Les universités canadiennes ont déjà entrepris ce travail. Dans des laboratoires de partout au pays, des membres de la population étudiante, du milieu de la recherche et du corps professoral réalisent des avancées en matière de communications quantiques sécurisées, de matériaux de pointe et d’applications de l’IA pour les soins de santé et les infrastructures. Ces personnes s’affairent à former la prochaine génération de chercheuses et chercheurs en cybersécurité, parce que les outils actuels ne seront d’aucune utilité devant les menaces reposant sur l’IA et l’informatique quantique. Leurs innovations s’arriment directement sur les priorités du Canada : protéger les systèmes critiques, moderniser le réseau électrique et améliorer les soins de santé.

Partout au pays, les universités sont le fer de lance de ces secteurs. À l’Université de Sherbrooke, l’Institut quantique mène des recherches d’intérêt international sur l’informatique, les matériaux et les communications quantiques. La University of Waterloo s’impose comme un chef de file de la science et de l’informatique quantiques, tandis que l’Institut Vecteur de la University of Toronto sert d’ancrage à l’écosystème d’IA au Canada.

En Colombie-Britannique, la University of British Columbia, la Simon Fraser University et la University of Victoria s’intéressent chacune à un axe distinct de recherche sur l’informatique quantique et les algorithmes et, dans le cadre de Quantum BC, elles mettent en commun leur expertise, favorisent le développement des talents et mobilisent des partenaires de l’industrie à l’échelle mondiale.

L’Institut de l’intelligence artificielle de l’Alberta (Amii), né à la University of Alberta et profitant de la contribution de la University of Calgary et de la University of Lethbridge, met au point des applications de l’IA pour divers secteurs. Au Québec, Mila, établi à l’Université de Montréal et réunissant des chercheuses et chercheurs de l’Université McGill, de Polytechnique Montréal et de HEC Montréal, figure parmi les instituts d’IA les plus influents au monde.

Au Canada atlantique, le laboratoire de détection quantique et de matière ultrafroide de la University of New Brunswick fait progresser les technologies de navigation dans les endroits où le GPS ne fonctionne pas, lesquelles pourraient avoir une utilité pour la défense.

Ces exemples illustrent en quoi les universités réalisent des percées qui pourraient faire du Canada un chef de file de l’innovation.

Or, ce leadership n’est pas garanti. Les États-Unis, l’Union européenne et la Chine investissent dans l’IA et les technologies quantiques à un rythme qui dépasse celui du pays. En l’absence d’une initiative canadienne, un concours pour l’obtention d’un financement de l’agence états-unienne de projets de recherche avancée pour la défense (DARPA) révèle que trois des dix-huit sociétés ayant un plan à court terme pour la construction d’ordinateurs quantiques sont canadiennes, dont Photonics qui est née à la Simon Fraser University et Nord Quantique, à l’Université de Sherbrooke. L’agence offre un financement stable, attire les meilleurs talents et arrime l’innovation sur des stratégies favorables à l’économie et à la sécurité.

S’il se laisse distancer, le Canada subira des conséquences réelles, soit l’exode des talents d’ici qui affaiblira sa capacité interne. Il devra alors s’appuyer sur des technologies étrangères pour alimenter son économie et défendre ses infrastructures. Les programmes à court terme et les règles changeantes sur l’immigration nuisent à la réputation du pays et diminuent son attrait auprès des plus brillants esprits au monde.

Le prochain budget sera déterminant pour orienter la croissance technologique du Canada. Le gouvernement fédéral ayant envisagé de réduire le financement de la recherche dans son examen des dépenses, c’est presque la totalité des investissements promis l’an dernier qui sont en jeu. Une telle compression du financement ferait fuir les chercheuses et chercheurs et minerait les efforts réalisés pour attirer les meilleurs talents et profiter de l’exode des cerveaux des États-Unis. On ne peut atteindre ces objectifs en retirant le soutien offert au milieu canadien de la recherche.

Un engagement à octroyer un financement stable à la recherche donnerait aux universités les assises nécessaires pour planifier leurs efforts et obtenir des résultats. De plus, en resserrant les liens avec l’industrie et le gouvernement, on s’assurerait que les découvertes universitaires génèrent plus rapidement des retombées pour l’ensemble du pays. En fondant de nouvelles chaires de recherche industrielle et quantique, on pourrait par ailleurs attirer des talents et renforcer les liens entre les universités et l’industrie canadienne.

En tant que pionnier de la recherche quantique, le Canada a une longueur d’avance pour créer de nouveaux secteurs et de nouvelles technologies; il ne doit pas gaspiller cet avantage.

L’IA et l’informatique quantique représentent la voie de l’avenir. Un investissement dans les universités canadiennes protégera l’économie, renforcera la défense et façonnera les infrastructures de demain. Le Canada dispose déjà de l’expertise – pour qu’elle porte ses fruits, il suffit qu’on s’engage à l’appuyer.