09 novembre 2015
Headshot of Robert Proulx, recteur, UQAM.

Quand le financement des universités diminue, c’est toute la société qui écope

Ce texte d’opinion a paru dans La Presse le 19 octobre 2015

Par Robert Proulx, recteur de l’Université du Québec à Montréal

Au cours des dernières semaines, les partis politiques ont multiplié les promesses. Malheureusement, l’enseignement supérieur et la recherche universitaire ont été les grands absents des débats.

Et pourtant : l’économie, l’emploi, le réchauffement climatique, le développement durable, la santé, la qualité de vie et le vivre ensemble sont autant d’enjeux pour lesquels les avancées de la recherche et la formation de personnel hautement qualifié sont essentielles.

Véritables incubateurs d’innovations scientifiques et sociales, les universités sont d’importants agents de progrès pour la société canadienne. En 2014, selon Universités Canada, les 97 établissements universitaires canadiens ont investi plus de 12 milliards de dollars en recherche et développement, soit 40 % de toute la R et D au Canada. Or, à peine 2,3 milliards provenaient des grands organismes subventionnaires de recherche fédéraux (CRSH, CRSNG et IRSC), dont les budgets en dollars constants ont diminué de 6 % depuis 2007.

Ce recul du financement public de la recherche est incompréhensible. A-t-on encore besoin d’insister sur la contribution essentielle des universités à l’essor de la société canadienne ? Manifestement – et malheureusement –, il semble que le rôle vital des universités au Canada demeure sous-estimé, sinon carrément négligé. Rappelons-en l’importance.

Des locomotives

Les universités favorisent le développement d’une économie prospère et contribuent à dynamiser les villes et les régions. À preuve, les universités canadiennes génèrent plus de 30 milliards de dollars en activité économique chaque année.

Par leur ancrage dans les milieux où elles déploient leurs activités, les universités ont un impact direct sur les communautés. En nouant des partenariats avec différents acteurs sociaux, économiques et culturels, elles renouvellent les pratiques sociales et citoyennes et apportent des réponses concrètes aux problèmes vécus par les collectivités.

Grâce à l’autonomie qui leur est reconnue, les universités ont par ailleurs la possibilité de réaliser des recherches fondamentales et désintéressées. Les retombées de ces travaux sont tout aussi estimables.

Par les réseaux de recherche qu’elles tissent dans le monde, les universités font rayonner l’expertise des chercheurs d’ici tout en favorisant l’accès au savoir mondial. Par leurs stratégies d’internationalisation, elles renforcent la coopération entre les pays, participent à la construction de nouveaux savoirs et contribuent à la recherche de solutions aux grands défis mondiaux.

Enfin, la recherche, c’est aussi ce qui permet aux universités d’offrir des programmes d’études de très haute qualité. La société dans son ensemble en profite, car elle peut ainsi compter sur des diplômés qualifiés, capables d’innover, engagés dans la vie de la Cité et aptes à participer au développement économique et au progrès social.

Assurer notre avancement collectif

Les universités constituent donc un atout des plus précieux dans une société qu’on dit du savoir. Le cas du Québec est éloquent : en 50 ans à peine, le nombre de diplômes décernés annuellement a été multiplié par 12 et la population étudiante est passée de 30 000 à plus de 300 000. Aujourd’hui, les universités québécoises accueillent des étudiantes et des étudiants de toutes les couches de la société, sur tout le territoire et venus de partout dans le monde. Ce sont des acteurs essentiels dans le développement social, environnemental, culturel et économique du Québec et leur rayonnement sur la scène internationale est extraordinaire.

Malheureusement, depuis 2012, le financement des universités québécoises a chuté d’environ 375 millions de dollars, et ce, alors même que les sommes allouées à la recherche par les grands organismes subventionnaires provinciaux et fédéraux stagnent ou diminuent. Une telle situation fait peser une menace inégalée sur la capacité des universités à accomplir pleinement leur mission.

Les gouvernements fédéral et provinciaux ont la responsabilité de mieux soutenir les universités. Celles-ci doivent avoir les moyens d’être des chefs de file mondiaux en matière de formation, de recherche et d’innovation. La prospérité du Canada et du Québec au cours des prochaines décennies en dépend.

Plus que jamais, il est temps que les visions purement comptables et austères de l’éducation et de l’université soient abandonnées.

Pour former une relève apte à penser le monde, à agir dans et sur le monde, les universités doivent être bien outillées. Pour rester à la fine pointe de l’innovation scientifique, technologique et sociale, elles ont besoin de plus de ressources. Pour continuer d’être le fer de lance de la recherche de solutions innovantes et porteuses, les universités doivent être plus énergiquement appuyées. Elles doivent, par-dessus tout, être mieux financées.

On l’a dit et redit, mais il est temps que le message soit compris : l’université n’est pas une dépense, c’est un investissement. Un investissement dans l’avenir de toute une société.

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