Cet article d’opinion a paru sur le site Web du Centre des politiques scientifiques canadiennes le 19 avril 2017
par Paul Davidson, président-directeur général, Universités Canada
Le Canada s’est doté d’un nouveau plan d’action pour redevenir un chef de file mondial en recherche. Le rapport tant attendu du Comité consultatif sur le soutien fédéral à la science fondamentale trace la voie vers un avenir prometteur pour l’écosystème de recherche canadien. Il évoque aussi un sentiment d’urgence dont nous sommes tous conscients.
Le rapport de 316 pages, Investir dans l’avenir du Canada : Consolider les bases de la recherche au pays, renferme beaucoup d’information. Mais comme l’a fait valoir David Naylor, président du Comité consultatif, nous ne devons pas nous perdre dans les détails des mécanismes et de la gouvernance au risque de rater cette occasion historique de regagner ce que nous avons perdu. Tout le milieu de la recherche canadien, aussi bien les organismes subventionnaires et les universités que les chercheurs, doit demander un réinvestissement massif dans la recherche fondamentale.
Le 10 avril, lors de la présentation du rapport, M. Naylor a été invité à expliquer comment le milieu de la recherche pouvait contribuer à la mise en œuvre des recommandations du groupe d’experts. « Le rapport contient toutes les données requises pour bâtir une foule de ponts entre les disciplines, les quatre organismes subventionnaires principaux et bien plus encore, a-t-il souligné. Je crois donc fermement que nous devons appuyer les recommandations dans leur ensemble, sans trop nous embrouiller dans les détails, pour multiplier les chances de voir le rapport adopté. C’est notre priorité. »
Nous vous méprenez pas, nous risquons gros si nous ne faisons rien.
Le rapport Naylor offre au Canada une occasion exceptionnelle de redevenir un chef de file mondial en recherche et en innovation. Le Comité consultatif composé d’éminents Canadiens a présenté au gouvernement fédéral et au milieu de la recherche un plan fondé sur des données probantes. Ce plan vise à renouveler le financement et à rétablir un soutien concurrentiel à l’échelle mondiale pour raviver l’excellence canadienne en recherche.
Le Comité consultatif a déployé beaucoup d’efforts. Ses conclusions se fondent sur plus de 1 200 documents écrits et une dizaine de tables rondes ayant réuni 230 chercheurs. Il trace la voie à suivre et nous met en garde contre l’inaction.
Le Comité souligne les nombreuses réalisations passées du Canada en science et en recherche, tout en précisant que nous avons commencé à perdre du terrain. Le rapport met aussi en lumière notre excellente image de marque sur la scène internationale, ainsi que la possibilité de faire d’importantes avancées pour l’avenir en raison du contexte mondial actuel. De manière générale, le Comité consultatif recommande l’amélioration de la gouvernance et de la supervision fédérale du système de financement de la recherche et, de façon encore plus pressante, une bonification stratégique du financement fédéral de la recherche.
Les universités assument actuellement plus de 50 pour cent des coûts de recherche, ce qui touche autant la recherche que l’enseignement. Les fonds réels d’immobilisations dans la recherche entreprise par des chercheurs indépendants ont diminué de 30 pour cent au cours des dernières années. L’aide financière accordée par le gouvernement fédéral en R-D dans l’enseignement supérieur représente maintenant moins de 25 pour cent des dépenses totales, alors que de nombreux autres pays membres de l’OCDE nous dépassent à ce niveau. En 2006, les universités canadiennes occupaient le troisième rang parmi les pays membres de l’OCDE au chapitre du pourcentage de PIB consacré aux dépenses en R-D.
Un financement accru du gouvernement fédéral permettra d’améliorer la qualité des projets de recherche dans les universités partout au pays et leur nombre, ainsi que l’enseignement pour la prochaine génération de scientifiques et de professeurs. Le rapport recommande de faire passer le financement accordé par le gouvernement fédéral de 3,5 à 4,8 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années.
Grâce au talent et à la feuille de route qu’il possède, le Canada peut devenir un chef de file mondial en recherche. Toutefois, sans un réinvestissement massif dans le système, la prochaine génération de chercheurs ne pourra réaliser son plein potentiel. Le rapport présente en effet une analyse détaillée des répercussions de l’érosion du financement de la recherche sur les chercheurs en début de carrière et propose des solutions à ces préoccupations de longue date. On y trouve des recommandations importantes en ce qui concerne la diversité et l’inclusion, ainsi que les défis liés à la géographie et à l’interdisciplinarité.
À titre d’exemple, lors du lancement, Claudia Malacrida, de la University of Lethbridge, a parlé de l’influence de l’emplacement géographique sur la recherche.
« Je crois qu’il est important de stimuler les systèmes de connaissances à tous les paliers, a-t-elle affirmé. En participant à ce processus, j’ai constaté que j’étais tellement en marge des autres que ça n’avait rien de drôle. De Lethbridge, il faut 11 heures pour se rendre à Ottawa, et cela se répercute sur nos activités régionales; nos travaux de recherche prennent du temps. Nous nous intéressons aux enjeux locaux et aux spécialités régionales, alors nous devons composer avec notre situation géographique et, même si elle représente parfois un défi, elle enrichit aussi le type de connaissances que nous produisons. »
Anne Wilson, de la Wilfrid Laurier University, a souligné le rôle des sciences humaines dans l’avancement de la recherche axée sur la découverte et l’innovation au Canada. « Certains des changements les plus importants dans notre société ont été apportés par les sciences humaines et par une meilleure compréhension de l’inclusion et de la justice sociale, a-t-elle expliqué. Malheureusement, l’influence de la recherche à cet égard passe parfois sous silence. »
Il va sans dire que ce rapport est révolutionnaire, mais son succès ne peut s’appuyer sur la seule excellence de ses données probantes et de ses arguments.
Martha Crago, membre du Comité consultatif, nous a rappelé la nécessité d’obtenir l’appui pour les investissements en recherche fondamentale non seulement auprès des parlementaires, mais aussi de tous les Canadiens. Nous devons expliquer en quoi consiste la recherche fondamentale et faire valoir ses avantages pour les gens de tous les milieux socioéconomiques. Nos universités doivent parler de la recherche de calibre mondial qui permet de sauver des vies, de lutter contre les changements climatiques et de favoriser l’innovation. Nous devons aussi former des champions.
Grâce à ce rapport, nous disposons de données probantes et d’un plan. Il ne reste plus qu’à unir nos forces pour passer à l’action.
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