La version originale de cet article d’opinion a paru en anglais dans Embassy le 10 décembre 2014.
Par Vianne Timmons, rectrice, University of Regina, et présidente, Comité consultatif permanent des relations internationales de l’AUCC
Dans la petite ville minière du Labrador où j’ai grandi dans les années 1960 et 1970, l’idée d’aller étudier dans un autre pays ne m’a jamais traversé l’esprit. Heureusement, les temps ont changé. Les jeunes d’aujourd’hui sont au fait des occasions qui s’offrent à eux et, à titre de rectrice de la University of Regina, j’ai le privilège de voir de nombreux jeunes Canadiens saisir l’occasion d’aller étudier à l’étranger.
J’ai toujours été frappée par le courage de ces étudiants. Je me souviens comme si c’était hier du jour où j’ai quitté la maison pour fréquenter l’université dans une province voisine. J’étais à la fois effrayée et enthousiaste. Je ne peux qu’imaginer à quel point ces sentiments doivent être forts chez quelqu’un qui s’installe dans un autre pays et s’immerge dans une autre langue et une autre culture. Il s’agit cependant d’une expérience porteuse de transformation, et les étudiants qui la vivent savent qu’elle les aidera grandement à se préparer au marché du travail d’aujourd’hui et de demain.
Les possibilités d’études à l’étranger témoignent de la priorité et de l’importance que les universités accordent à l’internationalisation. Les résultats d’une nouvelle enquête de l’Association des universités et collèges du Canada (AUCC), paru cette semaine, montrent que les activités internationales des universités gagnent en portée, en profondeur et en complexité. À l’heure actuelle, 95 pour cent des établissements membres de l’AUCC incluent l’internationalisation dans leur planification stratégique, et plus de quatre sur cinq en font une de leurs cinq principales priorités.
Le rapport de l’AUCC fait également ressortir les domaines où il est possible de faire mieux.
L’internationalisation des universités vise à préparer les étudiants à devenir des citoyens ouverts sur le monde et des travailleurs compétents sur le marché du travail canadien, à attirer de futurs citoyens et travailleurs, à tisser des liens avec des économies émergentes et à instaurer une collaboration avec les plus grands cerveaux du monde à résoudre des problèmes communs par la recherche et l’innovation.
La mobilité internationale des étudiants est un processus bidirectionnel, et nous entendons souvent parler des retombées économiques de la présence des quelque 89 000 étudiants étrangers qui séjournent au Canada. Chaque année, ils injectent près de huit milliards de dollars dans l’économie et créent 81 000 emplois. Ce dont nous entendons moins parler, c’est de la contribution de ces étudiants à nos universités et à nos collectivités.
Les étudiants étrangers enrichissent les campus et les villes de partout au pays par leurs points de vue, leurs langues et leurs cultures. Le contenu des programmes d’études est de plus en plus internationalisé, des perspectives mondiales étant intégrées à l’enseignement et à l’apprentissage. La présence de professeurs, de visiteurs et d’étudiants provenant de l’étranger contribue également à ajouter une dimension internationale à l’enseignement et à l’apprentissage pour tous les étudiants.
L’étude réalisée par l’AUCC montre que 72 pour cent des universités canadiennes prennent part à des initiatives visant à internationaliser leurs programmes d’études. Parmi celles-ci, 82 pour cent coordonnent des activités qui permettent aux étudiants d’acquérir des connaissances internationales. Par ailleurs, 53 pour cent intègrent les connaissances des étudiants étrangers au parcours d’apprentissage en classe, et 44 pour cent offrent du perfectionnement professionnel aux professeurs pour améliorer leur capacité à intégrer une dimension internationale ou interculturelle à l’enseignement.
Nos universités ont fait beaucoup pour améliorer l’éducation internationale, le Canada doit faire davantage pour qu’un nombre accru d’étudiants choisissent d’aller étudier à l’étranger, et que leur répartition géographique soit plus variée. À l’heure actuelle, 97 pour cent des universités canadiennes proposent des expériences d’études à l’étranger, et 78 pour cent d’entre elles financent la participation des étudiants aux programmes offerts. À titre d’exemple, à l’université où je travaille, les étudiants qui souhaitent effectuer un séjour d’études à l’étranger sont admissibles à une bourse de 1 000 $ pour couvrir une partie des coûts. Cependant, la demande est largement supérieure aux fonds disponibles.
Quoi qu’il en soit, les taux de mobilité étudiante à l’étranger demeurent faibles : seuls 3,1 pour cent des étudiants à temps plein au premier cycle au Canada (environ 25 000) ont vécu une expérience internationale en 2012-2013. Le Canada tire de l’arrière par rapport au Royaume-Uni, à l’Allemagne et aux États-Unis pour les taux de participation aux programmes d’études à l’étranger. L’Allemagne, par exemple, s’est donné comme objectif de faire en sorte que 50 pour cent des étudiants au premier cycle vivent une expérience à l’étranger d’ici 2020.
En outre, les étudiants optent encore principalement pour des pays anglophones ou de l’Europe occidentale, au détriment de puissances émergentes comme la Chine, l’Inde ou le Brésil.
Sur de nombreux autres plans, les activités d’internationalisation des universités canadiennes favorisent l’établissement de liens avec les économies les plus dynamiques du monde. Les universités qui définissent des priorités géographiques pour leurs activités internationales (86 pour cent), ciblent le plus souvent la Chine, le Brésil, l’Inde, les États-Unis, la France, le Mexique et l’Allemagne (par ordre décroissant). Les liens personnels établis entre ces établissements et des économies de première importante profiteront au Canada à long terme.
Pour faire progresser la participation internationale des universités (en multipliant les occasions d’études à l’étranger, les partenariats de recherche et par d’autres moyens), les universités, les gouvernements et les entreprises doivent collaborer. La nouvelle stratégie du Canada en matière d’éducation internationale est un bon point de départ, car elle reconnaît l’importance des expériences internationales pour les étudiants et fournit un cadre pour promouvoir l’excellence de l’enseignement universitaire canadien à l’étranger. Pour accroître les possibilités d’apprentissage et renforcer l’avantage concurrentiel du Canada au cours des prochaines années, il faudra déployer des efforts concertés en vue de tisser des liens en enseignement supérieur sur la scène internationale.
L’avenir du Canada sera en grande partie façonné par les expériences d’études des jeunes, aujourd’hui et dans les années à venir. Dans un monde de plus en plus complexe, ces expériences doivent s’étendre au-delà de nos frontières.
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