L’innovation universitaire : une force transformatrice pour l’économie canadienne de l’après-pandémie

16 septembre 2021
Headshot of Sophie D'Amours, vice-chair, Universities Canada and rector, Laval University

Cet article d’opinion a été publié le 15 septembre 2021 dans The Hill Times

Par Sophie D’Amours, rectrice de l’Université Laval et présidente du conseil d’administration d’Universités Canada

Nous devons investir afin de stimuler la prochaine vague d’innovation de rupture. Ce sont ceux et celles qui prennent des risques, qui font preuve de curiosité et qui s’efforcent de résoudre les problèmes qui nous mèneront là où nous ne pouvons même pas l’imaginer.

Chaque révolution technologique a été précédée par une crise mondiale majeure ayant donné lieu à des investissements publics importants. Et chaque fois, la répartition du pouvoir économique a changé.

Des changements technologiques transformeront notre société après les investissements massifs qui suivront la pandémie. C’est pourquoi nous devons encourager le développement d’une culture de l’innovation au Canada. Il faudra mieux souligner nos réussites et veiller à ce que les Canadiens et les Canadiennes soient fiers des nouvelles entreprises, fiers d’être les chefs de file dans un secteur, ou dans le peloton de tête. Cette culture de l’innovation, elle se construit avec les jeunes. Les collèges et les universités sont des environnements propices à l’alimentation et au renforcement de cette culture d’innovation.

Une culture de l’innovation forte pourrait motiver davantage d’entreprises à investir dans la recherche et le développement (R-D). Les pays réputés être les champions du monde de l’innovation investissent plus de 3 % de leur produit intérieur brut (PIB) en R-D chaque année. Au Canada, les entreprises investissent peu et de moins en moins. Au cours des 10 dernières années, elles ont réduit leurs investissements d’environ un milliard de dollars. En 2018, au Canada, les investissements en R-D représentaient 1,6 % du PIB, et la portion financée par les entreprises s’élevait à 42,6 %. En comparaison, la part des investissements en R-D provenant des entreprises s’élève à 56 % en France, à 66 % en Allemagne et à 62 % aux États-Unis.

Au-delà de la nécessité d’investir davantage dans les entreprises afin de stimuler la résilience et la force de l’économie à la suite de la pandémie, il est peut-être nécessaire d’étudier si les outils fiscaux privilégiés par le Canada pour inciter les entreprises à investir, comme les crédits d’impôt, produisent les bénéfices attendus. L’Allemagne, Israël et la Suède, par exemple, incitent davantage leurs entreprises à participer à l’innovation dans le cadre de projets ciblés, de missions précises et avec une aide directe.

Nous devons investir pour que la prochaine vague d’innovation de rupture prenne naissance ici. Ce sont ceux et celles qui prennent des risques, qui font preuve de curiosité et qui s’efforcent de résoudre les problèmes qui nous mèneront là où nous ne pouvons même pas l’imaginer.

Au chapitre des connaissances, il est essentiel que les universités aient la capacité de mener des travaux de recherche, de faire des découvertes menant à l’élaboration de nouvelles technologies et de former les précurseurs des secteurs de l’avenir pour que les bienfaits de l’innovation se concrétisent.

Nous devons aussi investir dans la recherche fondamentale : celle qui nous mènera à la prochaine grande vague d’innovation transformatrice. Compte tenu de la vitesse à laquelle notre monde évolue, on peut facilement estimer que dans les 15 prochaines années, à l’échelle de la planète, nous ferons plus de découvertes que depuis le début de l’humanité. Quel rôle jouera le Canada dans cette évolution?

Au moment où s’amorce notre réflexion sur la vie après la pandémie, nous devons rebâtir notre économie et faire des choix difficiles d’investissement. Des choix qui demanderont une certaine prise de risques parce que nous souhaitons augmenter la valeur de chaque emploi canadien sur les plans économique, social et environnemental. Le virage numérique affectera de façon structurelle tous les secteurs d’activités au Canada. La contribution des universités à ce chapitre est garant d’une transition plus rapide et efficace.

Nous devons en outre profiter de la transformation de notre économie pour la rendre plus durable. La lutte contre les changements climatiques ne peut être évacuée. Nous devons absolument réfléchir à notre rôle, sachant que l’Union européenne consacrera 30 % de son gigantesque plan de relance à la lutte contre les changements climatiques.

Les investisseurs étrangers privilégieront les pays ayant une main-d’œuvre compétente et d’excellentes capacités en matière de recherche, de développement et d’innovation. La course aux personnes talentueuses sera la ruée vers l’or des années 2020. Sans ces personnes hautement qualifiées, la prospérité dans l’après-pandémie est inatteignable. Il s’agit d’un pilier distinctif canadien, qui mérite toute notre attention.

Si nous voulons contribuer aux transitions à venir, nous devons aussi favoriser l’interdisciplinarité et l’inclusion pour mieux comprendre les enjeux d’acceptabilité éthique et sociale. Trop souvent, des projets importants tombent à l’eau parce que nous sous-estimons l’importance de la contribution des sciences humaines. Pourtant, l’innovation ne se limite pas aux technologies. Elle est le fruit de la créativité humaine, de relations fructueuses et de la volonté collective de régler des défis de société.

À l’approche des élections, nous pouvons nous pencher sur notre capacité à former, à innover, à transmettre et à transformer dans l’intérêt de tous les Canadiens et de toutes les Canadiennes grâce à notre réseau diversifié de 96 universités canadiennes, qui sont au service de leurs étudiantes et étudiants, de la recherche et de leurs collectivités. Nous avons aussi l’occasion de développer une réelle culture de l’innovation au Canada, de mettre de l’avant les innovants, de nourrir la fierté canadienne, d’être dans le peloton de tête et de faire connaître nos forces distinctives à l’échelle mondiale.

Sophie D’Amours est rectrice de l’Université Laval et présidente du conseil d’administration d’Universités Canada. Cet article a été repris avec l’autorisation du Policy Magazine.

 

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