Les investissements stratégiques en recherche sont essentiels pour préparer la main-d’œuvre de demain

01 octobre 2018
Student researcher looking at a petri dish.

Cet article d’opinion a paru dans le Hill Times le 1er octobre 2018

par Martha Crago, Paul Davidson et Molly Shoichet

Cet automne, le monde s’émerveillera devant les nouveaux lauréats des prix Nobel, des chercheurs visionnaires qui ont caressé de grands rêves et changé le monde. Les Nobel en sont la preuve : il faut parfois attendre jusqu’à 30 ans avant que les travaux de recherche menés dans les laboratoires et les bibliothèques universitaires portent leurs fruits et soient enfin célébrés. Pensons à John Polyani, qui a remporté un prix Nobel en 1986 pour ses travaux en cinétique chimique. Les réactions chimioluminescentes qu’il a observées pour la première fois en 1958 sont encore utilisées aujourd’hui dans les recherches sur la technologie laser.

Les investissements dans la recherche axée sur la découverte produisent des retombées à court et à long terme. Si nous voulons que le Canada devienne un chef de file et non un simple spectateur dans ce monde en constante évolution, le gouvernement doit investir dans la recherche et s’assurer que les jeunes Canadiens possèdent les outils nécessaires pour s’épanouir. En observant de plus près l’écosystème de recherche canadien, on constate qu’il repose en grande partie sur le perfectionnement des compétences et la formation du talent. La recherche apprend aux jeunes à penser de manière indépendante, à faire preuve de créativité et d’inventivité, à résoudre des problèmes et à élaborer des solutions. Ces compétences leur seront essentielles pour réussir et s’adapter aux besoins changeants du marché du travail.

Plus tôt cette année, le gouvernement fédéral a fait des investissements historiques pour soutenir la science et la recherche universitaire. Grâce à ces investissements dans les gens et les idées, le budget de 2018 fait la promotion de la diversité dans le domaine des sciences, aidant ainsi à former la prochaine génération de chefs de file canadiens en recherche.

L’annonce récente des supergrappes d’innovation dans les domaines des océans, de l’intelligence artificielle, de la fabrication de pointe, de l’industrie des protéines et de la technologie numérique témoigne d’investissements stratégiques dans la formation du talent et tire parti de nos forces en recherche.

Grâce à l’essor généré par les investissements du gouvernement fédéral en recherche, nous avons l’occasion d’unir nos efforts pour cultiver le talent et les idées afin de bâtir un meilleur pays. Avec l’appui des secteurs public et privé, nous pourrons réaliser notre potentiel d’aujourd’hui et de demain.

Nous avons déjà la feuille de route. Le rapport de l’examen du soutien fédéral à la science fondamentale de 2017 présente un plan pour bâtir un écosystème de recherche qui permet de former le talent canadien, de trouver des solutions à nos plus grands défis et de stimuler l’économie.

Investir dans la recherche fondamentale, c’est aussi investir dans les étudiants. Nous devons faire en sorte que la main-d’œuvre canadienne puisse apprendre aux côtés des meilleurs talents, avoir accès à des installations de recherche à la fine pointe et acquérir de l’expérience pratique grâce à des occasions de recherche intégrée au travail. La collaboration internationale, qui occupe aujourd’hui une place importante dans le domaine de la recherche universitaire, permet aux étudiants d’acquérir des compétences mondiales de plus en plus recherchées par les employeurs d’aujourd’hui.

De nombreux exemples illustrent cette réalité. En 2017, Facebook s’est implanté à Montréal en créant le FAIR, un laboratoire de recherche de pointe en intelligence artificielle (IA), en collaboration avec Joëlle Pineau, professeure à l’École de sciences informatiques de l’Université McGill. Cet investissement témoigne de la réputation de Montréal à l’échelle mondiale en tant que plaque tournante de la recherche et du talent en matière d’IA. L’entreprise a été attirée par la métropole en raison de son importante concentration de chercheurs en IA. Toronto jouit elle aussi d’une excellente réputation dans ce domaine, entre autres grâce aux découvertes du professeur Geoffrey Hinton et de son équipe, qui ont contribué à façonner l’écosystème de recherche. Leurs travaux ont d’ailleurs mené à la création du Vector Institute et ont attiré de nombreuses entreprises du Canada et de l’étranger.

Au pays, la majeure partie des travaux de recherche sont menés par des étudiants aux cycles supérieurs et par des chercheurs postdoctoraux. Malheureusement, il existe des lacunes importantes en matière de financement pour ces étudiants. En outre, les subventions destinées à accroître le nombre de chercheurs hautement qualifiés n’ont pas progressé au même rythme que l’inflation. Bon nombre d’entre elles ont la même valeur financière qu’il y a 25 ans. Pour former une main-d’œuvre novatrice, nous devons investir dans la recherche.

Certains croient à tort que les étudiants au doctorat finissent inévitablement par travailler dans le secteur de l’éducation postsecondaire. Or, selon une étude réalisée auprès des 10 000 personnes à avoir obtenu un doctorat de la University of Toronto, environ 40 pour cent d’entre elles travaillent dans le secteur industriel, public ou à but non lucratif. Habitués à sortir des sentiers battus, plusieurs lancent leur propre entreprise. En fait, près du quart des entrepreneurs canadiens sont titulaires d’une maîtrise ou d’un doctorat.

Les occasions d’apprentissage par l’expérience comme la recherche pratique de haut calibre aident les étudiants à développer leur pensée critique, à résoudre les problèmes, à travailler en équipe et à élargir leurs réseaux, ce qui leur donne un avantage concurrentiel dans le marché du travail en constante évolution.

Les petites et moyennes entreprises, qui représentent plus de 90 pour cent des entreprises canadiennes, comptent sur l’aide des centres de recherche universitaires et de leur personnel hautement qualifié. Ceux-ci permettent aux entrepreneurs avisés d’améliorer leurs produits, leurs procédés et leurs services en utilisant des laboratoires de recherche qu’ils n’auraient pas les moyens de bâtir eux-mêmes. Ces avantages sont encore plus importants lorsqu’on fait appel à des étudiants talentueux qui ont acquis de l’expérience en recherche grâce à des occasions d’apprentissage intégré au travail, comme les programmes coopératifs.

Le moment est venu pour le Canada d’être audacieux et ambitieux, de démontrer sa créativité et de se doter d’un avantage concurrentiel grâce à la recherche.

Nous savons que notre force économique tient aux investissements dans les gens et les idées. L’IA, qui relevait de la science-fiction lorsque les chercheurs s’y sont intéressés pour la première fois il y a quelques décennies, est aujourd’hui un secteur en pleine expansion. C’est aussi vrai pour la recherche sur les cellules souches. Celles-ci ont été découvertes au Canada dans les années 1960, mais nous commençons à peine à tirer profit de leur immense pouvoir de guérison. Cette recherche fondamentale a révolutionné le monde médical et a donné naissance à un tout nouveau secteur économique.

Nous devons donner suite aux investissements du budget de 2018 afin que les étudiants canadiens acquièrent les compétences recherchées par les employeurs grâce à des occasions de recherche. Les investissements dans les bourses d’études aux cycles supérieurs et la recherche sont essentiels à l’économie d’aujourd’hui et de demain.

Vous connaissez sans doute l’adage « l’avenir appartient aux jeunes. » Pour assurer notre avenir, nous devons offrir aux étudiants d’aujourd’hui des occasions qui leur permettront de poser des questions, de rêver, d’imaginer et de créer. La recherche est sans équivoque sur ce point. C’est maintenant qu’il faut agir.

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Martha Crago est vice-principale, Recherche et innovation, à l’Université McGill. Molly Shoichet est professeure de génie chimique et de chimie appliquée ainsi que de science des biomatériaux et de génie biomédical à la University of Toronto. Paul Davidson est président-directeur général d’Universités Canada.

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