Gardez votre parapluie à portée de main pour affronter la prochaine tempête

16 septembre 2021
Someone wearing a yellow coat, holding a yellow umbrella

Par Vivek Goel, recteur de la University of Waterloo et président du groupe consultatif d’experts sur l’élaboration d’une stratégie pancanadienne de données sur la santé.

Article d’opinion paru dans le Hill Times le 15 septembre 2021

Il n’est pas facile pour un gouvernement d’investir en prévision des mauvais jours, qui souvent est évalué en fonction de la question : « Qu’avez-vous fait pour moi dernièrement? » C’est pourquoi se préparer à des crises exceptionnelles comme une pandémie mondiale est si difficile. Pourtant, une bonne préparation permet d’éviter le pire, mais, lorsque le pire n’arrive pas, nous avons tendance à ne plus investir dans la prévention.

La COVID-19 a démontré que nous devons non seulement être prêts à faire face à des situations telles que les pandémies mondiales, mais que nous devons aussi être capables d’être souples afin de nous adapter rapidement aux nouveaux défis.

Pour ce faire, il ne suffit pas d’investir dans les ressources dont nous avons besoin, comme les équipements de protection individuelle ou les laboratoires; nous devons également investir dans notre capacité à réagir à des menaces inédites ou changeantes. Cette faculté à s’adapter peut être puisée à même le milieu de la recherche.

Quand on pense aux vaccins contre la COVID-19, les progrès sont remarquables. Au début de la pandémie, les experts en santé publique, dont moi-même, prévoyaient qu’un vaccin ne serait disponible que dans quatre à sept ans. Aujourd’hui, un an et demi après le début de la pandémie, 83 pour cent de la population canadienne admissible a déjà reçu au moins une dose du vaccin. Cette réalisation a été possible grâce aux décennies de travaux de recherche en science fondamentale qui ont permis de développer des vaccins à ARN messager.

Fin 2020, la gestion de la pandémie a pris un tournant lorsque certains variants du SARS-CoV-2 ont exigé de redoubler les efforts de détection et de lutte. Le Royaume-Uni a pu les détecter et les gérer rapidement grâce à des investissements soutenus dans ses laboratoires de santé publique, dans la génomique et dans les systèmes d’information. Cependant, au Canada, nous avons dû faire des pieds et des mains pour réunir les ressources nécessaires. Avec l’aide du gouvernement fédéral, les chercheurs des universités et des collèges ont joué un rôle essentiel en s’associant à leurs collègues de la santé publique pour aider à combler les lacunes là où le système de santé publique du Canada manquait de ressources.

Dans le cadre de sa Stratégie intégrée de lutte contre les variants préoccupants, le gouvernement canadien a reconnu l’importance du milieu universitaire et a financé des équipes collaboratives regroupant des experts de plusieurs établissements. Le réseau canadien de génomique COVID-19 (RCanGéCO), créé par Génome Canada, est un excellent exemple de partenariat intersectoriel qui tire parti des laboratoires et de l’expertise existants pour mener des enquêtes de santé publique et prendre rapidement des mesures en la matière. RCanGéCO a mis en place un réseau pancanadien qui assure la coordination des efforts en matière de séquençage à grande échelle du génome entre les universités et les hôpitaux de recherche. Nos cliniques et nos systèmes de santé publique n’ayant pas la capacité suffisante pour y parvenir seuls, le milieu de la recherche a été mobilisé pour répondre à ces besoins.

Le CoVaRR-Net, financé par les IRSC, est un réseau de chercheurs pancanadien qui se consacre à la lutte contre l’émergence de variants du SARS-CoV-2. Le réseau facilite les projets de recherche d’intervention rapide qui répondent à des questions décisives sur les variants, entre autres : Ces variants se transmettent-ils plus rapidement? Sont-ils plus susceptibles de causer des symptômes graves? Quelle est leur résistance aux vaccins? Les réponses obtenues par les équipes du réseau sont ensuite transmises aux décideurs d’ici et d’ailleurs pour informer des mesures en santé publique relatives entre autres à la pharmacothérapie et à l’efficacité des vaccins.

Il existe d’autres exemples de réseaux nationaux efficaces qui rassemblent des chercheurs pour lutter contre la pandémie. L’an dernier, j’ai eu l’honneur de diriger la mise en place de CanCOVID, un réseau dynamique de chercheurs, d’universitaires, de partenaires patients, de décideurs et de partenaires privés qui se consacrent à la lutte contre la pandémie en s’appuyant sur des données probantes. Grâce à CanCOVID, des chercheurs de différentes disciplines et de partout au pays s’efforcent ensemble de résoudre les problèmes qui nous préoccupent.

En outre, les travaux réalisés par les universités canadiennes restent indispensables pour combattre et contenir la pandémie. À la University of Waterloo, les experts de l’école de pharmacie suivent de près l’efficacité des vaccins contre certains variants. Au-delà des variants, le portail COVID19MisInfo.org de la Ryerson University lutte contre la désinformation liée à la COVID-19 au moyen d’un tableau de bord de la désinformation et en communiquant des renseignements fiables au public. Les données de modélisation mathématique, comme celles du réseau CanMOD hébergé par la Simon Fraser University, continuent de jouer un rôle essentiel auprès du public en aidant à déterminer le nombre projeté de cas et les tendances à l’échelle locale, régionale et nationale.

Ce ne sont là que quelques exemples du rôle concret et direct que joue le secteur postsecondaire dans la lutte contre la COVID-19.

Au cours de la prochaine décennie, les gouvernements devront prendre des décisions financières difficiles pour compenser les milliards de dollars consacrés à mitiger les conséquences de la pandémie. Après l’orage, le beau temps : une fois les nuages de la pandémie dissipés, les budgets de recherche seront inévitablement remis en question. Mais réduire ces budgets équivaut à jeter son parapluie à la fin d’une averse.

Chaque organisme du secteur public devra bien sûr jouer un rôle dans la réduction du déficit à l’avenir. Mais la question que tous les Canadiens devraient se poser est la suivante : préférez-vous garder un parapluie à la maison en cas de besoin, ou braver la prochaine tempête sans aucune protection?

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