Bienvenue sur le campus. Maintenant, allez à l’étranger!

10 octobre 2016
Paul Davidson, president of Universities Canada, as a university student in front of falls in Africa.

Cette lettre d’opinion a paru dans Policy Options le 10 octobre 2016.

Par Paul Davidson, président-directeur général, Universités Canada

Maintenant que les étudiants sont de retour sur leur campus pour une autre année universitaire, il est temps pour eux de songer à faire leurs valises. En plus de planifier leurs dissertations, examens et projets de recherche, les étudiants doivent faire un séjour d’études à l’étranger dans le cadre de leur parcours universitaire.

Ça peut sembler facile. Nous vivons dans une économie mondialisée. Les employeurs d’aujourd’hui privilégient l’embauche d’étudiants qui ont de l’expérience à l’étranger et une ouverture sur le monde. Plus de 80 pour cent des employeurs ayant embauché du personnel possédant une expérience internationale et interculturelle déclarent que ces employés ont permis d’accroître la compétitivité de leur entreprise. Il serait facile de croire que, de nos jours, la plupart des étudiants profitent de séjours d’études à l’étranger. En fait, au Canada, seuls 3,1 pour cent d’entre eux y participent annuellement. Comme Belinda Robinson, présidente-directrice générale de Universities Australia, l’a écrit ici le mois dernier : nous devons faire davantage.

Nous devons faire mieux. Même si beaucoup de changements ont été apportés au fil des ans pour faciliter les études à l’étranger et les rendre plus accessibles, les obstacles sont encore nombreux. Nous pouvons tout particulièrement faire davantage pour éliminer les barrières financières et instaurer une culture de la mobilité chez les jeunes Canadiens.

Ce sujet est une véritable passion pour moi. En 1983, j’ai fait le choix d’étudier à la Trent University, car un nouveau programme international proposait une « troisième année à l’étranger » et reconnaissait les crédits de n’importe quelle université dans le monde. J’ai choisi le Zimbabwe, un pays nouvellement indépendant et situé à la frontière de l’Afrique du Sud, alors en plein apartheid. Ainsi, j’ai dû condenser ma deuxième année scolaire, puis, pendant la fin de semaine de Pâques, j’ai pris le chemin d’Harare où j’ai commencé mon nouveau trimestre. À l’époque, il n’y avait ni formation avant le départ ni programme d’accueil ni bilan au retour, des formes de soutien désormais monnaie courante dans les établissements. Seulement quatre autres étudiants étaient blancs, et le reste de mes collègues étaient des Zimbabwéens de première génération qui s’étaient battus pour leur liberté et leur droit d’aller en classe. J’ai habité en résidences, mangé du sadza et écouté les étudiants qui racontaient avoir passé des examens obligatoires coincés entre les combattants du Front de libération et ceux des Forces armées rhodésiennes.

Un résident de mon étage avait été membre du Congrès national africain en exil à une époque où la République d’Afrique du Sud menait fréquemment des raids dans les pays voisins. Entre les trimestres, j’ai visité des régions rurales et rencontré les familles de mes amis en allant de découverte en découverte. Je ne peux pas dire que j’utilise souvent les connaissances acquises à cette époque, mais j’ai vécu cette année-là une expérience inestimable qui m’a ouvert les yeux sur la manière d’envisager les défis d’une collectivité, d’un pays et du monde. Ce que j’ai appris là-bas m’est aujourd’hui encore utile dans le cadre de mon travail et de ma vie personnelle.

Aujourd’hui, 30 ans plus tard, les Canadiens qui font un séjour d’études à l’étranger sont encore l’exception et non la norme. Même si le Canada est un pays ouvert sur le monde avec une économie axée sur le commerce, le pourcentage de Canadiens étudiant à l’étranger demeure inchangé depuis des décennies. Et la plupart de ceux qui le font se rendent chez nos partenaires traditionnels, comme le Royaume-Uni et la France. Que faudra-t-il pour que nous ayons de plus grandes ambitions et donnions à nos étudiants les moyens d’acquérir les compétences du XXIe siècle dont ils auront besoin dans le contexte mondialisé!

Si tous (universités, parents, gouvernement et entreprises) semblent conscients de l’importance des études à l’étranger, pourquoi donc le taux de participation demeure-t-il aussi obstinément bas? Les occasions ne manquent pourtant pas. Quatre-vingt-dix-sept pour cent des universités du pays offrent des possibilités d’études à l’étranger. Malheureusement, 70 pour cent des étudiants considèrent les coûts comme un obstacle et affirment qu’ils seraient plus enclins à étudier à l’étranger si ce type de séjour était plus abordable. Les universités ont lancé de nombreuses initiatives intéressantes pour aider leurs étudiants à surmonter ces difficultés financières, mais il reste beaucoup à faire pour que ces programmes deviennent accessibles.

Nous avons aussi des barrières culturelles à surmonter, comme l’a révélé une récente étude mondiale réalisée par HSBC auprès de parents. « Les études à l’étranger aident les étudiants à acquérir les compétences et la mentalité requises pour collaborer et faire face à la concurrence à l’échelle internationale, explique Betty Miao, vice-présidente à la direction et responsable en chef des services bancaires de détail et gestion du patrimoine de la Banque HSBC Canada. Pourtant, les parents canadiens sont parmi les moins enclins à dire qu’ils envisageraient d’envoyer leur enfant étudier à l’étranger après le secondaire, et plus de la moitié de ceux qui ont été interrogés ont affirmé que l’aspect financier était la principale difficulté, suivie par la crainte de l’éloignement. »

Favoriser une culture de la mobilité ne sera pas simple. Dans cette quête, les étudiants sont notre meilleur atout. Ceux qui reviennent d’un séjour d’études à l’étranger ne sont plus les mêmes. Ils qualifient leur expérience de « révélatrice » et « transformatrice ». Ils se sentent mieux préparés à intégrer le marché du travail et à devenir des chefs de file. Ils sont aussi heureux de parler de ce qu’ils ont vécu et encouragent les autres étudiants à partir à leur tour. Nous devons faire entendre leur voix et faire en sorte que les études à l’étranger deviennent une aspiration à grande échelle.

C’est exactement ce que tente de faire Universités Canada. Nous sommes sur le point de lancer une série de vidéos sur le site Web luniversiteçamarche.ca, dans lesquelles des étudiants universitaires racontent l’impact que les études à l’étranger ont eu sur leur vie professionnelle et personnelle. Luniversitéçamarche.ca présente des témoignages d’étudiants sur leur expérience d’études ou de recherche à l’étranger, ainsi que des chiffres et des articles liés à la mobilité étudiante. Par ces vidéos, nous souhaitons faire valoir l’impact considérable des séjours à l’étranger sur la vie des étudiants.

Il faut aussi raconter l’histoire des programmes d’études à l’étranger qui remportent du succès et élargir ces programmes afin qu’un nombre accru d’étudiants canadiens puissent en profiter. À cet égard, le programme Bourses canadiennes du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II est particulièrement prometteur. Dans le cadre de cette initiative chapeautée par la Fondation Rideau Hall, les gouvernements fédéral et provinciaux, les universités et le secteur privé unissent leurs efforts pour permettre à 2 000 étudiants de séjourner à l’étranger, dont 80 pour cent de Canadiens qui se rendront dans un pays du Commonwealth et 20 pour cent d’étudiants du Commonwealth qui viendront au Canada. Les prochains concours dépasseront les limites du Commonwealth et cibleront les chercheurs en début de carrière. À l’heure actuelle, 36 universités participent à ce programme concurrentiel qui mise sur les pratiques exemplaires à l’échelle internationale.

Le Canada est actuellement en bonne position, tant sur les plans économique et politique qu’en matière d’affaires étrangères, pour accroître de façon importante le nombre de jeunes Canadiens profitant d’expériences à l’étranger. En juin, j’ai assisté à une assemblée publique avec le premier ministre Trudeau, le président mexicain Enrique Peña Nieto et de jeunes chefs de file des deux pays, dont de nombreux Mexicains étudiant actuellement au Canada. Ces derniers ont parlé des retombées que leur séjour à l’étranger avait eues sur leur vie, tandis que MM. Trudeau et Nieto ont tenu de puissants discours sur l’importance de ces occasions pour les relations bilatérales.

Nous pensons souvent fièrement au Canada en tant que terre d’accueil pour des gens du monde entier, immigrants ou étudiants. Mais cela ne signifie pas que les étudiants canadiens ne doivent pas bouger. Ils ont tout autant à apprendre en quittant le Canada, et leur nouvelle vision mondialisée se répercutera sur leur façon de vivre et de travailler pendant de nombreuses décennies.

Non seulement ils en bénéficieront personnellement, mais notre pays en profitera également. Partout dans le monde, l’étroitesse d’esprit mène à la fermeture des frontières. Le Canada est un pays véritablement tourné sur le monde qui mise sur le commerce ouvert avec ses partenaires internationaux et ne peut pas se permettre de se replier sur lui-même. Pour notre avenir économique, il est essentiel d’offrir à nos jeunes des occasions d’apprendre et de tisser des liens à l’étranger.

Nous devons éliminer les obstacles financiers qui empêchent les étudiants canadiens de vivre de telles expériences. Il faut entre autres investir davantage dans des programmes comme les Bourses canadiennes du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II. Et le sesquicentenaire du Canada offre au gouvernement fédéral l’occasion idéale d’investir dans les études internationales – et de laisser un héritage d’engagement mondial aux générations futures.

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