Cet article d’opinion est paru le 3 mars 2019 dans la section Report on Business du Globe and Mail.
Par Frank McKenna, président suppléant du conseil d’administration du Groupe Banque TD, ancien ambassadeur du Canada aux États-Unis et ancien premier ministre du Nouveau-Brunswick
Le Canada est devenu un véritable pôle d’attraction pour les étudiants étrangers, qui sont actuellement plus de 570 000 au pays. Il s’agit d’une hausse fulgurante de 60 pour cent en trois ans.
Les étudiants étrangers sont un moteur important pour l’économie, dans laquelle ils ont injecté plus de 15,5 milliards de dollars en 2016 seulement. Les diplômés qui restent au pays continuent de contribuer à l’activité économique; ils fondent des entreprises ou constituent des atouts précieux pour les entreprises canadiennes qui bénéficient de leur ouverture sur le monde et des liens qu’ils ont avec les marchés internationaux. Ceux qui retournent dans leur pays agissent comme ambassadeurs du Canada, ce qui favorise nos relations avec leur pays d’origine, et incite d’autres étudiants à venir ici.
Malheureusement, l’inverse n’est pas vrai. Sur le plan de la mobilité étudiante vers l’étranger, le Canada a une mauvaise cote. À peine onze pour cent des étudiants canadiens au premier cycle séjournent à l’étranger pendant leurs études. En comparaison, 33 pour cent des étudiants français, 29 pour cent des étudiants allemands, 19 pour cent des étudiants australiens et 16 pour cent des étudiants américains vivent une telle expérience.
Qui plus est, les quelques étudiants canadiens qui vont à l’étranger pendant leurs études au premier cycle tendent à choisir des destinations traditionnelles, comme les États-Unis, le Royaume-Uni, la France et l’Australie.
Si ces destinations ne sont pas mauvaises en soi, c’est dans les pays à forte croissance économique (pensez à l’Asie et à l’Amérique du Sud), avec qui le gouvernement fédéral conclut déjà des accords d’investissement commerciaux, que se trouvent les meilleures occasions pour le Canada. Les économies émergentes représentent aujourd’hui 60 pour cent du PIB mondial. Pour améliorer la compétitivité du Canada sur la scène internationale et maximiser la valeur de nos accords commerciaux, nous devons donc inciter les étudiants à choisir ces régions.
Le gouvernement canadien s’est engagé à diversifier ses relations commerciales, à accroître le nombre de secteurs qui font des affaires à l’international et à développer nos marchés étrangers. Ce type de diversification est tout aussi souhaitable dans le milieu de l’éducation postsecondaire; la moitié des emplois au pays exigeront des compétences entièrement nouvelles, alors que l’intelligence artificielle et l’automatisation seront bien implantées.
Dans l’intérêt des étudiants, de la main-d’œuvre de demain et de l’économie en général, nous devons agir de façon cohérente et nous doter d’une stratégie pancanadienne qui permettra à nos étudiants d’aller à l’étranger en plus grand nombre, et de continuer à attirer les meilleurs étudiants de partout dans le monde.
Je ne suis pas le seul à croire que pour réussir, le Canada a besoin de citoyens ouverts sur le monde : plus de 80 pour cent des responsables de l’embauche au Canada considèrent la compréhension interculturelle et la connaissance du marché mondial comme des avantages concurrentiels majeurs; les employeurs recherchent des travailleurs qui excellent en résolution de problème et en communication, et qui ont l’esprit d’équipe; une main-d’œuvre résiliente qui s’adapte aux nouvelles exigences.
Les études à l’étranger créent une ouverture sur le monde et permettent d’acquérir des compétences très recherchées. Elles placent aussi les étudiants au cœur de réseaux internationaux riches en possibilités, resserrent les liens du Canada avec les pays de destination et contribuent directement à l’atteinte de nos objectifs commerciaux.
Le budget de 2019 est l’occasion parfaite pour le Canada de lancer une initiative ambitieuse qui renforcera l’économie du pays et donnera aux Canadiens les moyens de réussir dans l’économie du savoir.
Notre stratégie devrait s’inspirer du travail important effectué par le Groupe d’étude sur l’éducation mondiale de la Munk School of Global Affairs and Public Policy et du Centre d’études en politiques internationales. Dans son rapport de 2017, Éducation mondiale pour les Canadiens, le groupe fixe à 25 pour cent la proportion d’étudiants canadiens de niveau postsecondaire qui devraient faire des études à l’étranger au cours des dix prochaines années. L’objectif est ambitieux, mais les retombées potentielles pour la main-d’œuvre et l’économie en valent la peine.
Avec une stratégie pancanadienne et le plein soutien du gouvernement fédéral, cet objectif peut être atteint. Il s’agit d’un élément logique, et même essentiel, de toute initiative visant à diversifier les relations commerciales canadiennes.
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